Immigration
Une flotte européenne pour sauver les migrants en mer Méditerranée, un projet désormais sur les rails
« Les politiques migratoires sécuritaires de l’Union européenne ont abouti à la création d’une véritable « Europe forteresse » dont le bilan humain est désastreux, transformant la Méditerranée en un cimetière à ciel ouvert. »
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C’est face à ce constat, extrait de la proposition de résolution européenne visant à la création d’une flotte européenne de sauvetage en mer Méditerranée, portée par les députés Elsa Faucillon (communiste) et Thomas Portes (LFI), que la commission des Affaires européennes de l’Assemblée nationale a adopté le texte en novembre dernier. Désormais publiée au Journal officiel, la parlementaire communiste qui portait l’initiative se félicite « d’une belle avancée », même si, comme elle le rappelle, « on n'est pas au bout du chemin pour que cette flotte voie le jour. Il y a encore des combats à mener. »
Les États membres de l'Union européenne doivent solidairement faire en sorte qu'il y ait des navires pour sauver les migrants en mer Méditerranée
Dans une inversion totale de responsabilité, la résolution affirme que les États membres de l'Union européenne doivent solidairement faire en sorte qu'il y ait des navires pour sauver les migrants en mer Méditerranée. Elle exige également que tout migrant secouru soit débarqué dans un lieu sûr, conformément aux règles du droit maritime international.
L’objectif est double : garantir un secours immédiat aux migrants en détresse, et mettre fin à la criminalisation des sauvetages effectués par les ONG pro-migrants. Certains n’ont d’ailleurs pas manqué de remercier la députée pour sa mobilisation.
Les lois italiennes entravent de plus en plus les sauvetages en mer
Les tirs de barrage contre les ONG pro-migrants se multiplient, notamment en Italie, pays en première ligne face à l’invasion migratoire. Pour limiter drastiquement leur capacité d’action, le décret « Piantedosi », adopté en janvier 2023, impose aux navires de sauvetage de rejoindre un port immédiatement après un unique sauvetage.
La mesure s’avère particulièrement dissuasive. En décembre 2024, l’Italie a même facilité la confiscation des navires humanitaires, rendant leur action de plus en plus difficile à réaliser. Médecins Sans Frontières (MSF), qui opérait avec son navire Geo Barents depuis 2021, a suspendu ses missions, en pointant directement les conséquences du décret sur son activité. Après quatre sanctions en deux ans, ayant entraîné 160 jours d’immobilisation au port, le Geo Barents est désormais contraint de rester à quai.
Les sauvetages en mer ne font pas partie des missions de Frontex
Toutefois, lors de l’examen de la proposition en commission des lois, Sylvie Josserand, députée du Rassemblement national, a rappelé que ces missions pouvaient s’exercer par l’agence Frontex. Elsa Faucillon lui a rétorqué : « L’agence a, elle-même, déclaré que le sauvetage ne fait pas partie de sa mission. »
C’est pourquoi, même si la résolution veut que la crimination des sauvetages par les ONG pro-migrants cesse, l’objectif principal reste la création d’une flotte européenne spécifiquement dédiée.
Mais les ambitions ne s’arrêtent pas là. La résolution demande aussi au gouvernement français de travailler à l’annulation de l’accord du 2 février 2017 entre l’Italie et la Libye. L’accord permet aux garde-côtes libyens d’intercepter les migrants pour les renvoyer dans des centres de détention.
Quelles suites pour la résolution ?
La publication de la résolution au Journal officiel est certes un pas en avant, mais sa mise en œuvre risque d’être délicate. La création d’une flotte européenne nécessiterait une véritable harmonisation des politiques migratoires entre les États membres. Or, la tendance actuelle va plutôt vers la signature d’accords avec des pays tiers pour externaliser la gestion de ces politiques.
L’Italie, pionnière en la matière, est scrutée de près par ses voisins, même jusqu’à Bruxelles. Pour une fois, pas pour la critiquer, mais plutôt pour s’en inspirer. En effet, Giorgia Meloni a ouvert deux centres pour migrants en Albanie, où les demandeurs d’asile sont censés attendre que leur dossier soit étudié, loin des côtes européennes. Ce projet fait des émules parmi les pays membres de l’Union européenne, bien qu’il soit pour l’instant contesté par la justice européenne. Cette résolution illustre donc le cœur de la bataille qui se joue actuellement au sein de l’UE.
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