Immigration
Jean-Paul Gourévitch : « Le coût de l’AME n’a cessé d’augmenter depuis sa création. »
Dans votre dernière étude pour Contribuables Associés, vous dites que le coût de l'immigration pour les Français est plus important que le budget annuel alloué à la justice. Quel commentaire en faites-vous ?
Le travail que je fais est scientifique. Les résultats sont présentés à partir des bases de données que je fournis et de la méthode que j’explicite. Certes, ceux que j’ai obtenus dans la balance dépenses-recettes soit 53,9 milliards de déficit hors pénombre de l’immigration, sont supérieurs aux estimations des économistes de gauche (entre 5 et 36 milliards d’euros) et inférieurs à ceux des économistes de droite et d’extrême droite (entre 70 et 298 milliards d’euros). C’est sa seule finalité. J’estime n’avoir pas à me prononcer sur les interprétations politiques de ces chiffres.
D’après vos études, l’immigration coûte plus cher aux contribuables qu’elle ne rapporte. L’idéologie pro-migrante fait donc fi de vos expertises ?
Sur ce point, vous avez raison. Aucun économiste de gauche ne peut affirmer le contraire. Mais ce résultat est passé sous silence sous prétexte que la migration n’est pas une affaire de chiffres. Pour avoir passé 26 ans en Afrique subsaharienne, je comprends très bien qu’elle ne peut se réduire à la géométrie des parcours ou à l’arithmétique des entrants et des disparus. Mais les Français ont besoin de savoir ce que l’État fait de leur argent.
Un chiffre étonnant est sorti au printemps dernier, l’État verserait 750 millions d’euros à des associations militantes très actives dans l’accueil des migrants. Quel commentaire faire de cette information ?
Les subventions aux associations qui s’occupent des migrants sont un chiffre gris. Selon le jaune budgétaire 2023 qui porte sur l’exercice 2021, l’État a effectué 102 000 versements à des associations pour un montant total de 10,5 milliards d’euros dont 71,5 % de subventions contre 22,5 % de prestations de services (plus 6 % de divers).
Mais la part dévolue à l’immigration est difficilement repérable. Nous l’avons chiffrée aux alentours d’1,2 milliard d’euros avec toute l’ambiguïté d’une telle estimation qui relève en grande partie de ce que nous appelons « la pénombre de l’immigration ».
Quel est le rôle de l’Union européenne dans le financement des associations, structures et plateformes faisant la promotion de l’immigration ?
Cette question très difficile mériterait une étude approfondie qu’avec nos moyens, nous sommes incapables de mener. Dans l’étude faite pour Contribuables Associés « Combien nous coûte et nous rapporte l’Union Européenne en 2019 », nous soulignions déjà cette difficulté.
Il n’y a eu aucune avancée à ma connaissance sur ce point, les think tank les plus équipées comme l’Institut Montaigne, l’IFRAP ou l’Institut Thomas More, sont hésitants à entreprendre ce parcours labyrinthique.
L’AME coûte-t-elle aussi cher aux contribuables ? Doit-elle être une des priorités des politiques ?
Le coût de l’AME n’a cessé d’augmenter depuis sa création en 1999 pour atteindre aujourd’hui 1,497 milliard d’euros selon la députée Véronique Louwagie, coût que nous avons prudemment limité à 1,3 milliard d’euros. Elle touche plus de 400 000 bénéficiaires.
Toutefois, la France n’est pas le seul pays de l’Union européenne à la pratiquer, même si elle est la plus généreuse. Ce qui coince, c’est que les Français « natifs » qui ont des difficultés à se soigner constatent que les immigrés en situation irrégulière sont mieux traités qu’eux. C’est pourquoi nous avons proposé d’instituer une contribution pour les bénéficiaires, ce qui permettra d’assurer le suivi des dossiers, rapportera peu, mais réduira les risques de xénophobie. Et surtout d’aborder courageusement le problème des « étrangers malades » qui coûtent 250 millions d’euros par an et qui sont devenus un moyen de régularisation des déboutés avec le soutien des associations pro-migrants.
Comment se calcule le coût de l’immigration ? Les données publiques suffisent-elles à en arriver au constat qu’est le vôtre ? Comment améliorer la transparence de ces données ?
Je renvoie au sous-titre de l’étude : « Recettes, dépenses, investissements, rentabilité ». J’ai indiqué dès le départ que « cette synthèse doit être consommée avec modération ». Nous ne disposons pas de toutes les données et celles qui sont officielles ne suffisent pas, surtout quand on aborde le problème des coûts indirects, comme par exemple la part des immigrés et de leurs descendants dans le marché de la drogue et les dépenses médicales afférentes.
Il faudrait créer un observatoire indépendant tel que Michel Rocard l’avait imaginé quand il a mis en place le Haut Conseil de l’Intégration. Mais celui-ci a été dissous et l’Observatoire qui lui était associé ne s’est jamais réuni.
Pourquoi le grand public ne réagit pas à ces chiffres ? Est-il au courant de vos études et de leurs résultats ?
Cette fois l’étude a été chroniquée par le Fig-Mag, Europe 1, Sud-Radio, CB News… donc nous ne pouvons pas nous plaindre.
Comment expliquer que vos études soient qualifiées par une partie de la presse de faire le jeu de l’extrême droite ?
Historiquement, l’extrême droite, via Pierre Milloz a été la première, pour des raisons d’ailleurs politiques, à étudier le coût de l’immigration. Mais ce n’est pas la seule explication. Plutôt que d’analyser les conclusions, on préfère essayer de stigmatiser l’auteur.
Dans mon cas, c’est très facile. Comme je donne des interviews et publie dans des journaux classés à droite ou très à droite comme Atlantico ou Valeurs Actuelles, mais aussi à gauche ou très à gauche comme l’Institut Mandela ou Solidarité Internationale, il suffit de valoriser les premiers et d’occulter les seconds comme vient de le faire France-Info à qui nous avons demandé un droit de réponse et qui a gardé le silence ou Wikipedia qui le jour de la parution de l’étude a décapité la moitié de ma notice et a transformé l’autre moitié en acte d’accusation.
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