Société
« Frontal » : Libération se lance dans une croisade contre « l’extrême droite »
En cette rentrée 2023, le quotidien Libération a décidé de renforcer sa couverture médiatique de « l’extrême droite » à l’aide d’une nouvelle cellule spécialisée. Le journal ne cache pas son intention principale : la diabolisation du Rassemblement National.
La rentrée du quotidien Libération s’ouvre sur une promesse éditoriale : le renforcement de la couverture médiatique de « l’extrême droite ».
« Informer sur l’extrême droite, arracher ses masques, braquer la lumière sur ses mots et ses actes : cet engagement est de très longue date celui de Libération. […] poursuivre ce travail nous semble plus essentiel que jamais ». Pour ce faire, le média lancera dès mardi 5 octobre une newsletter baptisée « Frontal » qui informera de façon hebdomadaire son lectorat au sujet des actualités de la mouvance politique. Quatre journalistes travailleront à temps plein sur le sujet au sein d’une cellule spécialisée. Cette décision de renforcer la couverture de cette « famille politique », détaillée dans un article publié le 29 août par le quotidien, permet de saisir pleinement les conceptions politique et idéologique du média.
Jouer sur les peurs
L’article s’ouvre sur un parallèle assumé entre « un Rassemblement National entré de force à l’Assemblée » et les « groupuscules racistes qui prospèrent jusque dans les plus petites villes du territoire » tous placés sous une même et unique étiquette : l’extrême droite. « Cet amalgame est le point clé du document » analyse Frédéric Saint Clair pour Livre Noir. Selon le politologue, la confusion entre le parti respectueux des principes de la République qu’est le RN et des groupuscules d’ultra-droite potentiellement violents est un utile moyen de « faire peur à son lectorat et de décrédibiliser le RN en laissant entendre qu’ils appartiennent au même groupe, à savoir l’extrême droite ».
Or, cette confusion ne serait pas simplement une stratégie médiatique ou une position artificielle, mais constituerait en fait la structure idéologique de la gauche radicale. « Si l’on s’intéresse à la presse des années 50 et 60, on observe que les communistes avaient déjà recours à ce type d’amalgame. Cette gauche qui se perçoit comme neutre considère comme extrême droite tout ce qui n’est plus à gauche. La suspicion s’étend même au centre macroniste » commente Frédéric Saint Clair. On se souvient, à titre d’exemple, d’un article rédigé par Paul Quinio pour Libération et publié le 27 août : « Gérald Darmanin, avec ou contre l’extrême droite ? ».
(Extrême) droite
Mais la confusion demeure-t-elle une bonne stratégie alors que de nombreux politologues et historiens réfutent aujourd’hui l’étiquette « d’extrême droite » en ce qui concerne notamment le Rassemblement National ? Libération s’inscrit par exemple en faux contre l’analyse de Marcel Gauchet qui déclarait lors de l’entre-deux-tours de l’élection présidentielle de 2022 au micro de Sonia Mabrouk sur Europe 1 que le parti « incarne quelque chose de très différent de ce qu’a été l’extrême droite du passé et [qu’on] gagnerait à le reconnaître ». Les distinctions établies par le politologue Jean-Yves Camus, ne semblent pas non plus prises en compte par la rédaction de Libération. Le spécialiste de l’extrême droite différencie nettement la droite radicale, à laquelle appartiendrait le Rassemblement National selon lui, et les groupes d’extrême droite, qui refusent les règles de la République, lors d’une conférence donnée en 2022 au sujet des mouvances d’ultra-droite en France et en Europe.
Selon Frédéric Saint Clair, cette offensive est le symptôme d’une guerre idéologique profonde qui se joue en France en ce moment. « Si la gauche ne se sentait pas menacée de manière existentielle, elle n’entamerait pas cette démarche. L’année s’ouvre avec des propositions droitières soutenues par le gouvernement, le pouvoir centriste libéral a acté le fait que le jeu politique est emmené par ce qu’on appelle l’extrême droite. » Reste à savoir si la stratégie de re-diabolisation menée par Libération réussira à porter ses fruits.
1 commentaire
SOS Racisme : « Le Rassemblement National est le parti du crime »
[…] qui est l’extrême droite politique ». L’amalgame n’est pas neuf à gauche, en témoigne l’article de Libération au sujet de la newsletter « Frontal […]
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