Politique
[Info Frontières] – La France insoumise dépose une loi pour abroger le délit d’apologie du terrorisme
Ce mardi 19 novembre, le député Ugo Bernalicis, membre du groupe La France insoumise, a déposé une proposition de loi. Elle vise l’abrogation pure et simple du délit d’apologie du terrorisme, inscrit dans le code pénal français depuis 2014. Pour lui, cet outil juridique est devenu une menace directe contre la liberté d’expression, détourné de son objectif initial, surtout depuis les attaques du 7 octobre.
Dans sa proposition, le député s’attaque à un usage qu’il juge abusif et disproportionné du délit d’apologie du terrorisme, inscrit à l’article 421-2-5 du code pénal. Initialement conçu pour combattre la glorification explicite des actes terroristes, ce dispositif est accusé d’être utilisé de manière détournée, notamment pour sanctionner des opinions critiques ou des expressions politiques.
Une montée en puissance depuis les attaques du Hamas
Pour le député LFI, l’utilisation de ce délit s’est intensifiée après les attaques du Hamas en Israël le 7 octobre 2023. Une circulaire du garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti, datée du 10 octobre 2024, a demandé aux magistrats de réprimer fermement tout discours jugé favorable aux actions du Hamas ou du Djihad islamique.
Le texte de cette circulaire est sans équivoque : « la tenue publique de propos vantant les attaques précitées, en les présentant comme une légitime résistance à Israël, ou la diffusion publique de message incitant à porter un jugement favorable sur le Hamas ou le Djihad islamique, en raison des attaques qu’ils ont organisées, devront ainsi faire l’objet de poursuites du chef précité ». Pour Ugo Bernalicis, cette directive, si elle a permis de sanctionner certains discours incitant explicitement à la violence, a également conduit à des dérives répressives contre des opinions politiques divergentes.
Une explosion des poursuites judiciaires
Les chiffres illustrent la portée de cette répression : selon Le Monde, 626 procédures pour apologie du terrorisme étaient ouvertes au 30 janvier 2024, dont 278 liées au pôle national de lutte contre la haine en ligne. Ces données, en forte hausse par rapport aux années précédentes, inquiètent les défenseurs des libertés publiques.
D’après LFI, un climat de surveillance politique s’installe , ciblant notamment Mathilde Panot, présidente du groupe, et Rima Hassan, élue européenne. Ces deux élues ont été convoquées en justice pour des propos publics critiquant les politiques israéliennes, assimilés à une apologie du terrorisme.
Une législation jugée floue et dangereuse ?
L’article 421-2-5 du code pénal est particulièrement critiqué pour son flou juridique, qui laisse une large marge d’interprétation aux juges et aux autorités. Cette incertitude contribue, selon la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH), à fragiliser les bases mêmes d’une société démocratique. « La liberté d’expression n’est pas faite seulement pour les idées et informations inoffensives, mais aussi pour celles qui choquent ou inquiètent », rappelle la CEDH.
L’alternative proposée par LFI
La proposition de loi d’Ugo Bernalicis vise à abroger cet article controversé et à revenir aux dispositions de la loi sur la presse de 1881 pour traiter les abus de liberté d’expression. Outre l’abrogation de l’article 421-2-5, le texte prévoit deux rapports parlementaires sur l’usage passé de ce délit, l’un portant sur son application depuis 2014, et l’autre spécifiquement sur les procédures engagées après les attaques du 7 octobre 2023.
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