Société
Délinquance juvénile : une génération de mineurs criminels hors de contrôle ?
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Il y a encore quelques années, on croyait la jeunesse protégée du pire. On pensait que la violence la plus brutale appartenait aux milieux criminels adultes, aux réseaux mafieux, aux guerres de territoires. Mais aujourd’hui, la réalité est bien différente.
En France, des adolescents assassinent, torturent et tuent avec une froideur qui dépasse l’entendement. Certains deviennent des bourreaux, d’autres des victimes. La liste des noms s’allonge : Louise, 11 ans, lardée de coups de couteaux et retrouvée morte dans un bois en Essonne. Élias, 14 ans, poignardé à mort pour un téléphone. Philippine, 19 ans, violée puis assassinée et enterrée au bois de Boulogne. Shaina, victime d’un viol en réunion à 13 ans, puis brûlée vive à 15. Si ces victimes — et bien d’autres — n'ont pas toutes eu affaire à des monstres à peine majeurs, elles ont cependant un point commun : leur jeunesse.
Cette jeunesse pourtant, est aussi le visage d’une criminalité qui se transforme, où les bourreaux sont parfois aussi jeunes que leurs proies. Longtemps, l’enfant criminel était perçu comme une aberration, un accident de parcours tragique. Aujourd’hui, il est une réalité. La délinquance juvénile ne se contente plus de petits larcins ou de bagarres de cour d’école. Elle s’organise, elle s’arme, elle tue.
Ces affaires alimentent un sentiment de peur et posent une question essentielle : assiste-t-on à une explosion de la criminalité des jeunes, ou à une perception exacerbée par la médiatisation ? Si les statistiques révèlent une baisse globale de la délinquance des mineurs, elles mettent également en évidence une radicalisation de la violence. Loin des incivilités classiques, certains adolescents commettent aujourd’hui des actes d’une brutalité inédite, parfois comparables aux crimes des adultes les plus endurcis.
Des chiffres alarmants masqués par le déni
Les défenseurs des droits de l’enfant répètent à l’envi que la délinquance des mineurs est en baisse, s’appuyant sur des statistiques qui masquent une réalité bien plus sombre. Selon le rapport du ministère de la Justice — Les mineurs délinquants —, en 2020, 187 700 mineurs ont été traités par les parquets pour des affaires criminelles, soit 2,8 % de la population des 10-17 ans. Parmi eux, plus de la moitié (51 %) avaient entre 16 et 17 ans, tandis que 40 % avaient entre 13 et 15 ans. Et ce ne sont pas de simples infractions mineures :
- 20 % étaient impliqués dans des coups et violences volontaires (contre 17 % des majeurs).
- 4,7 % ont commis des viols et agressions sexuelles (contre 1,8 % des majeurs).
- 20 % étaient impliqués dans des vols et recels aggravés (contre 5,3 % des majeurs).
- 8,2 % ont commis des destructions et dégradations (contre 3,7 % des majeurs).
Ces chiffres parlent d’eux-mêmes : les mineurs surpassent désormais les adultes en matière de violence. Pourtant, plutôt que d’admettre l’évidence, certains continuent de leur chercher des excuses. Poignarder, violer, massacrer… mais avec circonstance atténuante : ils n’ont pas encore soufflé leurs 18 bougies.
Des jeunes bourreaux qui n’inspirent aucune pitié
Les rixes ultra-violentes, les guet-apens mortels et les exécutions froides sont également devenus monnaie courante. Les faits divers se multiplient, et chaque nouvelle affaire dépasse en horreur la précédente. À Marseille, des adolescents de 14 ou 15 ans sont recrutés comme tueurs à gages pour quelques milliers d’euros, exécutant froidement des règlements de compte. À Antibes, quatre mineurs de 15 et 16 ans ont assassiné un adolescent. À Châteauroux, un jeune de 15 ans a poignardé Matisse, du même âge, de plusieurs de coups de couteau au thorax. Et la liste est encore longue. Et que dire de ces jeunes monstres qui, après avoir massacré leur victime, filment leur crime pour le diffuser sur Snapchat ?
À l’instar des règlements de comptes qui ensanglantent les grandes villes, la violence s’infiltre désormais jusque dans les villages les plus reculés et les campagnes autrefois épargnées. Le phénomène de « jeunesse criminelle » n’est plus circonscrit à certains territoires.
À Crépol, dans la Drôme, un soir de novembre 2023, un bal de village bascule dans l’horreur. Entre les rires insouciants, une bande de Romans-sur-Isère s’infiltre, armés de couteaux, avant de semer la panique en attaquant sans distinction. Thomas Perotto, 16 ans, n’est pas rentré chez lui ce soir-là, il a été poignardé en plein cœur. La mort, désormais, ne prévient plus.
Des parents totalement dépassés (ou complices ?)
Aujourd’hui, ces parents qui abandonnent leur rôle éducatif laissent la rue, les réseaux sociaux et les criminels faire leur travail à leur place. Pourtant, lorsque ces mêmes enfants finissent devant la justice après avoir poignardé un camarade ou organisé un guet-apens, les regards se tournent exclusivement vers l’État, l’école, la police. Mais jamais vers ceux qui auraient dû leur inculquer, dès le départ, la différence entre le bien et le mal.
En théorie, la loi prévoit déjà des sanctions pour les parents défaillants. L’article 227-17 du Code pénal punit de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende tout parent qui se soustrait à ses obligations légales au point de compromettre la santé, la sécurité, la moralité ou l’éducation de son enfant mineur (Legifrance). Par ailleurs, la responsabilité civile des parents est engagée en cas de faute de leur enfant mineur. Ils doivent donc indemniser les victimes pour les dommages causés par leur progéniture.
Mais dans les faits, ces dispositions sont peu appliquées. Très peu de parents sont réellement poursuivis pour manquement à leurs obligations éducatives, et encore moins condamnés. Cette impunité soulève une question : comment espérer responsabiliser les mineurs quand leurs propres parents ne le sont pas eux-mêmes ?
Le débat sur un renforcement des sanctions contre les parents d’enfants délinquants est relancé à chaque drame, mais sans jamais aboutir à des mesures concrètes. Pourtant, certaines pistes mériteraient d’être étudiées : durcissement des sanctions pénales existantes, suppression des aides sociales en cas de récidive, ou encore obligation d’un suivi éducatif contraignant pour les familles concernées.
Si un adolescent peut poignarder un camarade sans que ses parents ne soient inquiétés, alors la société continue d’envoyer un message préoccupant : l’impunité est garantie, pour les enfants comme pour ceux qui les élèvent. Il est temps que cette irresponsabilité cesse d’être un bouclier juridique. Un mineur criminel est avant tout le produit d’un échec parental, et il est grand temps d’en tirer les conséquences.
Les réseaux sociaux : une école du crime à ciel ouvert
Snapchat, TikTok, Instagram, Telegram… Autrefois plateformes de divertissement, ces applications sont devenues de véritables laboratoires de la violence juvénile. Les jeunes se filment avant de diffuser fièrement leurs exploits sur les réseaux. Humilier, frapper, parfois tuer : voilà le nouveau terrain de jeu d’une génération en quête de likes.
Certains influenceurs, conscients du filon, vont encore plus loin en appelant ouvertement à la violence. C’est le cas de l’Algérien Doualemn, qui diffusait des vidéos contenant des appels au meurtre. Une situation qui aurait pu se solder par son expulsion… si seulement la justice française ne s’en était pas mêlée. Car au lieu d’être renvoyé, ce dernier a finalement obtenu gain de cause devant le tribunal administratif de Melun, qui a même condamné l’État à lui verser 1 200 euros d’indemnisation. Un bel exemple d’autorité. Comment s’étonner que certains adolescents ne comprennent plus où sont les limites ?
Une justice dépassée et complice du chaos
Face à ces criminels juvéniles, quelle est la réponse de la justice ? Un laxisme coupable qui frise l’indécence. L’ordonnance de 1945, pensée pour une époque où les mineurs étaient des enfants chapardeurs, est devenue un permis de tuer pour les délinquants d’aujourd’hui.
Selon le ministère de la Justice, 43 400 des 187 700 mineurs délinquants en 2020 n’ont fait l’objet d’aucune poursuite, faute de preuve ou pour d’autres motifs juridiques. Pire encore, parmi les 144 300 mineurs « poursuivables » :
- 80 500 ont vu leur affaire classée sans suite après une simple mesure alternative.
- Seulement 48 200 ont été traduits devant un juge.
- 2 100 ont exécuté une composition pénale, soit une peine dérisoire.
En résumé, près de 60 % des mineurs « poursuivables » ne subissent aucune conséquence sérieuse. Quand l’impunité devient la norme, quand la violence est encouragée et monétisée, pourquoi voudraient-ils se comporter autrement ?
À lire aussi : Délinquance en 2024 : des violences en hausse, un narcotrafic incontrôlé
1 commentaire
vert10
Lire le pédopsychiatre maurice berger . Ils sont irrécupérables. Le Dr Maurice Berger dénonce les dénis sur les violences gratuites et rappelle avoir prophétisé ces « milliers d’adultes violents » « Même si cela ne représente qu’une partie des problèmes de sécurité, la proportion de délinquants d’origine immigrée est effectivement importante, et cela mérite qu’on y réfléchisse. ». Dans la culture maghrébine, comme l’indique la sociologue Nassima Driss, l’espace est genré, l’espace public est masculin alors que la place de la femme se situe au sein du foyer. Il y a là une différence anthropologique de représentation de l’espace. Pour cette jeune femme, on doit agir en être responsable et donc discuter. Pour l’auteur, cela a peut-être été impensable car c’est l’homme qui commande. Par ailleurs, j’entends l’indignation liée aux agressions mortelles récentes mais ces faits ne m’étonnent pas car nous vivons depuis des dizaines d’années dans un triple déni de la violence. Un déni sociologique, celui qui a forgé le concept de « sentiment d’insécurité » alors qu’il y a une insécurité réelle, avec une violence gratuite toutes les 44 secondes en France en 2018. Un déni médiatique, que je combats depuis 1992 lorsque j’ai décrit pour la première fois cette violence dont je commençais à voir l’augmentation dans ma pratique médicale, et où j’indiquais que nous allions avoir des milliers d’adultes violents dans vingt années à venir. En 2008, dans mon livre « Voulons-nous des enfants barbares ? Prévenir et traiter la violence extrême“, j’ai consacré un chapitre à la nécessité de comprendre les processus menant à la violence chez les adolescents maghrébins. Aucun des nombreux journalistes qui m’ont interviewé à propos de cet ouvrage n’a voulu évoquer ce chapitre, en m’expliquant que ce n’était pas politiquement correct. Un déni politique aussi, le mot d’ordre étant « après moi, le déluge ». On constate dans l’actualité quotidienne le résultat logique de ce triple aveuglement. Le crime est donc devenu un mode de traitement des litiges. Un autre élément est un fonctionnement familial clanique
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