Nader, les yeux crevés et poignardé à plusieurs reprises par un schizophrène à Paris

Le 8 octobre 2022, alors qu'il est tranquillement assis sur un banc du jardin Villemin (Paris 10ᵉ), Nader, un réfugié iranien récemment arrivé en France, voit sa vie basculer en une fraction de seconde. Selon Le Parisien, un homme surgit et l'attaque, lui crevant les yeux avant de le poignarder à plusieurs reprises. Aujourd’hui, cet homme brisé tente de survivre avec un handicap irréversible, tandis que la justice s’apprête à statuer sur le sort de son agresseur, un Afghan schizophrène en pleine crise psychotique.

Les témoignages recueillis sur place décrivent un assaillant armé d'un couteau en céramique, se jetant sur sa victime sans préavis. Pris de panique, Nader parvient à fuir, un réflexe qui lui a probablement sauvé la vie. Dans sa course, il abandonne ses lunettes et sa carte bancaire, que les forces de l’ordre retrouvent sur les lieux.

Transporté en urgence à l’hôpital Cochin (XIVe), il subit une intervention chirurgicale au cours de laquelle des morceaux de lame sont extraits de son corps. L’attaque a laissé la victime partiellement aveugle : il a perdu un œil, et le second est sévèrement touché. Ancien designer graphique spécialisé dans la création de logos pour l’imprimerie en Iran, il voit son avenir s’écrouler. Sa cécité partielle l'empêche désormais d’exercer son métier. 

« Il souffre d’importantes douleurs et d’une gêne qui l’empêchent d’utiliser les écrans ou simplement de jouer aux jeux vidéo, un loisir qu’il affectionnait particulièrement. Il fait des chutes et il a des difficultés à se mouvoir », décrit son avocate, Me Claude Vincent.

Son handicap rend impossible l’apprentissage du français en ligne. Il se retrouve dépendant de l’aide de compatriotes pour survivre, communiquant tant bien que mal en anglais et en dari (persan oriental). « Psychologiquement, il est dans un état désastreux », ajoute Me Vincent.

Son niveau de souffrance est évalué à 3,5 sur une échelle de 7 et son taux de handicap est estimé à au moins 35 %. La Commission d’indemnisation des victimes d’infraction (Civi) lui a proposé une réparation financière de 40 000 euros, une somme jugée insuffisante par son avocate, qui entend se battre pour obtenir davantage.

Quelques minutes après l’agression, la police interpelle le suspect sur le quai de Valmy, alors qu’il marche en direction de la place Stalingrad. Il est arrêté, placé en garde à vue, puis transféré à l’infirmerie psychiatrique de la préfecture de police avant d’être hospitalisé à Sainte-Anne (XIVe).

L’auteur des faits, Isaac, est un Afghan de 25 ans, arrivé en France en mai 2022 après un passage par l’Allemagne. Sans emploi ni domicile, il consommait régulièrement du cannabis. Lors de son interrogatoire devant le juge d’instruction, il explique son geste par une confusion : 

Il pensait s’en prendre à l’agresseur de sa sœur, en Iran. Le 16 mars 2023, il est mis en examen pour « tentative de meurtre » et incarcéré en attendant l’issue de l’enquête.

Selon Yon Liova, chef de service du groupe hospitalier universitaire de Paris, l’expertise psychiatrique confirme qu'Isaac souffre de troubles psychotiques sévères. L’expert conclut que l’attaque a été commise sous l’emprise d’un « délire aigu de persécution et d’une désorganisation de la pensée », ce qui aurait totalement aboli son discernement.

S’il est reconnu pénalement irresponsable, il ne pourra pas être jugé. L’expert recommande alors une hospitalisation sous contrainte à Sainte-Anne, avec un suivi médical strict et un traitement sous contrôle chimique.

Le parquet appuie cette recommandation, rappelant le cas d’un homme souffrant d’un trouble similaire, relâché avant de tuer une personne à Livry-Gargan le 3 février dernier. « C’est toujours une angoisse et un échec, car c’est cette même chambre de l’instruction qui l’avait libéré », souligne le magistrat.

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