Société
Martial Bild : « tout le monde déteste la Police de la pensée ! »
ENTRETIEN – Martial Bild, directeur général de TVLibertés, a répondu à nos questions sur la stigmatisation et l’oppression sévissant dans les médias français.
Comment TVL est-elle devenue une chaîne de réinformation ? Bis : N’êtes-vous pas dans une bulle de “médias de réinformation” ?
Chacun connait cette fameuse phrase de Saint-Augustin : « A force de tout voir, on finit par tout supporter. A force de tout supporter, on finit par tout tolérer. A force de tout tolérer, on finit par tout accepter. A force de tout accepter, on finit par tout approuver. »
Dès 2013, la démarche des fondateurs de TVLibertés a été de ne jamais faire preuve d’approbation, de résignation ou de servilité face à la pensée conformiste. Et pour cela, il fallait donc construire une presse exigeante, vivante et indépendante qui reflète parfaitement l’opinion populaire : une presse de réinformation.
Mais TVL n’a pas été conçue pour être un organe de propagande pour lutter contre une autre propagande. TVLibertés a inventé une télévision de troisième type. Ni alimentée par l’argent public, ni par les annonceurs publicitaires. Ni dépendante de subventions, ni propriété d’un lobby, d’un parti, d’un milliardaire ou oligarque. Son choix est annoncé dans son nom, elle n’appartient qu’à ses téléspectateurs et se qualifie de presse audiovisuelle alternative.
Son objectif est bien de fournir des informations alternatives aux médias de grand chemin commerciaux ou étatiques et d’être créateur d’une information exemplaire et vérifiée, loyale et libre. Ces buts et ses objectifs sont en passe d’être tous atteints et TVL joue dorénavant pleinement son rôle de contre-pouvoir démocratique au Parti des médias.
BIS : Les 25 journalistes et techniciens qui façonnent TVL au quotidien n’habitent pas sur une autre planète ! Ils vivent, évoluent et filment au cœur de la Cité. Une des raisons du succès de la chaîne, c’est d’avoir su, par exemple, être au cœur battant des rebellions qui ont mobilisées les Français sincères au cours des dix dernières années : des Bonnets rouges aux partisans des libertés pendant la crise sanitaire, de la Manif pour Tous aux Gilets jaunes.
Pour répondre complètement à votre question, j’ajouterai que TVL est un media d’influence. Pour cela, il a naturellement décidé de ne pas être une chaîne payante mais une œuvre de reconquête, non repliée sur un milieu et moins encore arc-boutée sur un dernier carré. Avec trois millions de téléspectateurs uniques par mois, le risque de bulle est définitivement écarté, non ?
Que répondre à ceux qui vous qualifient de courroie de transmission pro-russe ou de complotiste ?
Mais absolument rien ! Ces termes ou notions imprécatoires – et il y en a encore quelques autres – sont infondés. Ils constituent des armes pour étrangler, ostraciser l’expression publique et imposer une tyrannie médiatique sur de très nombreux sujets. Tous ceux qui s’opposent aux intérêts souvent convergents de l’extrême centre et de l’ultra gauche doivent subir ces attaques grotesques qui mènent, et c’est le but, à la censure avec, comme nous l’avons déjà vécu, le « deplatforming », au bannissement de nos programmes des plateformes vidéos. Il faut apprendre à vivre avec les dénonciations de la Kommandantur et bien comprendre que cette tactique de la caste médiatique ou politique est en train de trouver ses limites tant… tout le monde déteste la Police de la pensée !
L’on n’a jamais autant scandé l’importance de la liberté d’expression aujourd’hui car elle serait sous le joug de l’extrême droite, qu’en pensez-vous ?
Je répondrai à cette question par une remarque simple : je soulève régulièrement des cris d’orfraie quand je rappelle de manière incessante que les journalistes doivent suivre la Charte de Munich qui garantit la liberté d’expression. Cette charte de déontologie, adoptée en 1971, énumère les devoirs du journaliste parmi lesquels : respecter la vérité, qu’elles qu’en puissent être les conséquences pour soi-même ; rectifier toute information publiée qui se révèle inexacte et défendre la liberté de l’information, du commentaire et de la critique.
Citer ces devoirs suffit à montrer où en est la profession aujourd’hui en France. Il est spécialement significatif que les journaux érigés en modèles actuels dans les écoles de journalisme, tournent le dos à chacun des éléments de déontologie qui précèdent. Toutes les valeurs professionnelles, naguère promues par les médias progressistes hégémoniques, se retrouvent aujourd’hui prioritairement dans la presse d’opposition au pouvoir, ou mieux, dans la presse non alignée, alternative.
Là encore, nous payons cher notre volonté, à rebours de l’entre-soi de la caste, de vouloir représenter ce que vit le peuple, exprimer son ressentiment mais aussi ses exigences et ses espoirs. Là où la presse dominante n’a d’obsession que la lutte contre le populisme, à laquelle elle sacrifie tous ses anciens principes.
Si le totalitarisme idéologique devait avoir une couleur politique actuelle, quelle serait-elle ?
Il convient de faire un constat préalable : le totalitarisme, non encore comme concept mais comme réalité, comme pratique politique, est né à gauche et même quasiment avec la gauche : c’est la Révolution française qui le fait apparaître, plus précisément dans sa phase jacobine, c’est-à-dire la période qui n’est pas appelée pour rien la Terreur. Tout y est déjà fixé : Robespierre qui en 1793, le jour même de Noël traditionnellement fait de paix et de joie, proclame que « le gouvernement révolutionnaire […] ne doit aux ennemis du Peuple que la mort » ; la « loi des suspects » imposée la même année qui permet de jeter en prison à peu près tout opposant politique ; et pour justifier tout cela, le mot fameux de Saint-Just : « Pas de liberté pour les ennemis de la liberté ». Cette phrase résume toute l’attitude de la gauche vis-à-vis de ses opposants et jusqu’à aujourd’hui. L’élimination des adversaires a été physique chez les continuateurs communistes de la Convention à l’étranger – des bolchéviques aux maoïstes – et elle s’est contentée d’être une relégation idéologique, politique et sociale en Occident, non seulement dans les pays gouvernés par la gauche socialiste, mais aussi dans ceux que dirige la droite libérale, puisque celle-ci laisse tout le champ libre à la gauche dans l’ensemble du secteur culturel, de l’éducation aux médias.
Aujourd’hui, une dérive totalitaire règne en Occident, par la monopolisation du discours autorisé par les médias hégémoniques, qui sont presque uniformément conformistes. Dans leur discours, la charge totalitaire provient, quant à sa racine, de leur prétention « hyper-morale ». La sécularisation postrévolutionnaire a abouti à un remplacement du clergé par un néoclergé idéologique, qui au terme d’une dérive de deux siècles est passé des philosophes aux journalistes, gardiens zélés du dogme et nouveaux inquisiteurs munis non plus d’une carte de presse mais d’une carte de prêche.
TVL lutte avant tout contre l’ostracisme ou pour le pluralisme idéologique ?
L’un ne va pas sans l’autre, dans notre démarche. Lutte contre l’ostracisme tout d’abord, parce que nous nous souvenons que l’« ostrakismos » était en Grèce antique une procédure par laquelle l’assemblée populaire votait le bannissement d’un membre toxique de la Cité. Or, aujourd’hui, cette procédure salvatrice a été inversée : c’est le point de vue populaire qui est censuré et banni ! Ce sont ceux qui osent porter dans l’espace public la voix de la majorité silencieuse qui sont désormais persécutés, toujours au nom de minorités (ethniques, religieuses, sexuelles, délinquantes, etc.). Le comble étant que ces minorités ont pour point commun la remise en cause des fondements de la Cité, de son identité et de ses traditions, de ses valeurs centrales de cohésion : l’ostracisme fonctionne aujourd’hui comme l’exact contraire de l’institution grecque. Et c’est précisément une minorité qui assure cette dictature des minorités, à savoir la caste journalistique dominante. Rétablir l’intérêt national, le salut de la Cité, passe donc en priorité aujourd’hui par la nécessité de défaire le parti des médias.
C’est le titre de l’ouvrage que j’ai écrit, il y a quelques mois, avec le président de TVL, Philippe Milliau.
L’autre face de notre activité est la lutte en faveur du pluralisme. Elle n’est pas seulement la conséquence logique d’une exigence de fin du monopole médiatico-culturel de la gauche, car nous ne nous positionnons pas d’abord par rapport à la gauche – qui, elle, ne peut s’empêcher de se positionner en permanence contre nous.
Nous nous positionnons quant à nous positivement, par rapport à nous-mêmes, à notre héritage et notre identité ! Or, cette identité est celle du pluralisme intellectuel, qui spécifie à nos yeux la civilisation européenne, dont toute l’histoire culturelle est faite du principe de confrontation dialectique, depuis les dialogues socratiques en passant par le principe du contradictoire en droit romain, jusqu’aux « disputationes » des universités médiévales et aux méthodes de réfutation de la science moderne. Pour que nous restions nous-mêmes, nous devons assurer « l’avenir de l’intelligence ». À cet égard, l’actuel dogmatisme idéologique, l’univocité du parti des médias, représentent l’abandon du principe vital et structurant de la pensée française et européenne.
Qui n’est pas le bienvenu sur votre antenne ?
Il n’y a pas de liste noire à TVL. Nous nous en tenons depuis dix ans au même principe : TVLibertés accueille tous les défenseurs de l’esprit français et de la civilisation européenne. Cela ne doit pas faire oublier que nous avançons dans une France bardée de lois qui obèrent la liberté d’expression et sont donc proprement liberticides. Et que les plateformes comme YouTube édictent leurs propres lois iniques.
Pendant la crise sanitaire, toute remise en cause des dogmes établis par l’OMS ou le gouvernement français étaient censurée sur la plateforme de Google. Cela n’a pas empêché la chaîne d’apporter une contre-offensive unique à l’avancée quotidienne du rouleau compresseur médiatico-gouvernemental qui organisait autour des mesures sanitaires une passivité civique et une perte de libertés publiques inouïes, et uniques en temps de paix.
Est-ce que le tribunal de l’opinion publique est plus fort aujourd’hui que l’État de droit ?
La question est ambiguë ! Si vous voulez dire par là que la fabrication de l’opinion par les médias dominants constitue une entrave au fonctionnement normal des institutions, c’est parfaitement exact. L’immigration illégale, par exemple, fait l’objet d’une mansuétude constante des médias, qui conduit à l’irrespect de nos frontières et de notre droit de la nationalité, tant par la pression de l’idéologie dominante sur les juges, que par un conditionnement des citoyens français qui n’osent s’élever vigoureusement contre cette atteinte létale à leurs institutions et à leur avenir.
De même, une personnalité politique condamnée par le parti des médias le sera le plus souvent aussi par l’appareil juridictionnel, en violation des principes généraux du droit. Un exemple emblématique fut l’élimination médiatico-judiciaire du candidat Fillon à la présidentielle de 2017. Les condamnations de personnalités comme Renaud Camus ou même Éric Zemmour devant la 17ème chambre correctionnelle sont pareillement des scandales, puisqu’elles relèvent du délit d’opinion, contraire à notre longue tradition juridique.
Il pourrait cependant être répondu différemment à votre question, si vous vouliez dire en la posant, qu’aujourd’hui, l’État de droit pourrait être remis en cause par la volonté populaire. L’ambiguïté vient de la notion d’« État de droit » : après avoir longtemps désigné simplement le respect par l’État du droit issu de l’assentiment du corps social (depuis les coutumes médiévales jusqu’aux lois contemporaines), la notion a été profondément altérée dans la seconde moitié du XXème siècle, pour devenir la doctrine de la soumission de l’État au règne des droits individuels, placés au-dessus de l’intérêt général par l’idéologie tardive des droits de l’homme. On est passé de la notion d’État de droit à celle « des tas de droits », selon le mot de Guy Carcassonne.
Dans cette perspective, il est indispensable qu’une véritable opinion publique, disons mieux une opinion populaire et majoritaire, s’émancipe du conditionnement dont nous parlions à l’instant pour réclamer le retour de l’intérêt général, du Bien commun, contre le chaos de l’individualisme juridique et la ruine de l’autorité du politique. Et dans ce cas, il faut certainement une révolte nationale et populaire contre le gouvernement des juges – en particulier ceux du Conseil constitutionnel et du Conseil d’État.
Ces magistrats dénaturent le droit entériné par le peuple français par des interprétations idéologiques, et censurent les lois souhaitées par les électeurs, ce qui n’est rien d’autre qu’un déni de la souveraineté nationale.
Le plus grand danger auquel la presse française fait face est… ?
« La » presse, mais il n’y a pas une seule presse française ! En revanche, il existe bel et bien un système médiatique qui développe une légitimité dédoublée, habilitant les hommes politiques dans un monde parallèle qu’il nomme « vérité » construit par les habiles sélections de la « vérification des faits ». Tout le reste étant renvoyé dans le monde ténébreux de la « post-vérité ». L’emprise médiatique revêt ainsi les caractéristiques du totalitarisme, fût-il doux. Le plus grand danger est donc que le Parti des médias, érigé en ministère de la Vérité, recouvre entièrement le réel par l’idéologie, et exclu ceux qui n’adhèrent pas aux dogmes officiels.
Le système médiatique, érigé en ministère de la Vérité, peut alors devenir un vecteur de terreur sociale. D’où l’importance et la nécessité vitale de renforcer la presse alternative, avant qu’il ne soit trop tard.
Martial Bild
Directeur général TVL
Co-auteur de « Défaire le parti des médias » Editions Dualpha.
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