« Je suis fier d’être pédophile » : Joël Le Scouarnec, chirurgien aux 299 victimes, jugé pour trente ans de viols

Tout commence le 2 mai 2017, lors d’une perquisition au domicile de ce chirurgien de 66 ans à Jonzac, en Charente-Maritime. Une semaine plus tôt, la gendarmerie avait reçu la plainte des parents d’une fillette de 6 ans, qui racontait avoir été témoin, dans son jardin, d’exhibitions sexuelles de Le Scouarnec et avoir été pénétrée avec les doigts à travers un grillage. Sur place, les gendarmes découvrent un lieu de vie sordide : entre jouets sexuels, perruques et poupées auxquelles étaient attachés des godemichets, ils mettent la main sur des disques durs contenant plus de 300 000 fichiers pédopornographiques, certains d’une violence extrême, ainsi que sur des « carnets noirs » et des fichiers informatiques nommés « Quequette » et « Vulvette ». 

Dans ces documents, ce criminel consignait méthodiquement les noms, âges, lieux et descriptions des abus perpétrés sur ses patients, souvent sous anesthésie, dans une quinzaine d’hôpitaux du grand Ouest. Il y racontait aussi ses ressentis, s’adressant directement à ses victimes. « Tout en fumant ma cigarette du matin, j’ai réfléchi au fait que je suis un grand pervers. Je suis à la fois exhibitionniste, voyeur, sadique, masochiste, scatologique, fétichiste, pédophile. Et j’en suis très heureux », notait-il le 10 avril 2004.

Pendant trente ans, de 1985 à 2017, Joël Le Scouarnec a profité de sa position de chirurgien pour abuser de ses victimes, repérant ses proies parmi les patients opérés pour des appendicites ou hospitalisés sur le long terme. « Les victimes étaient endormies et sédatées. Elles n’étaient pas en état de percevoir les faits ni de les dénoncer », expliquait le procureur de Lorient, Stéphane Kellenberger, en 2024. La moyenne d’âge des 299 victimes recensées est de 11 ans, certaines n’ayant que quelques mois. Il agissait seul dans les chambres, profitant de l’inconscience ou de la confiance des enfants : « Moi, il m’a fait ça pendant une auscultation médicale et, avec les yeux d’une petite fille, on fait confiance à son médecin », témoigne une victime.

Ce chirugien décrit comme « solitaire » et « passe-partout » par ses collègues, avait déjà été condamné en 2005 à quatre mois de prison avec sursis pour consultation de sites pédopornographiques. Sans obligation de soins, il avait repris son activité, poursuivant ses crimes avec un sentiment d’impunité intact. Le 3 décembre 2020, jour de ses 70 ans, la cour d’assises de Charente-Maritime le déclare coupable de viols et agressions sexuelles sur ses nièces, sa petite voisine et une patiente, le condamnant à 15 ans de réclusion criminelle. Comme le rapporte France Info, deux mois plus tôt, en octobre, il était mis en examen pour 312 victimes supposées, ramenées à 299 en raison de prescriptions.

Ce procès, qui durera quatre mois pour un coût de trois millions d’euros, met en lumière un système dans lequel les alertes et soupçons n’ont pas suffi à stopper un prédateur. Aujourd’hui incarcéré, Joël Le Scouarnec reconnaît la plupart des faits, tout en niant les pénétrations vaginales, malgré des éléments de l’enquête suggérant le contraire. Reste une question lancinante : combien de vies brisées aurait-on pu éviter ?