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Les enjeux de l’incursion d’Israël dans le sud du Liban
Dans la nuit de lundi à mardi, l’armée israélienne a annoncé le lancement de raids terrestres limités et ciblés contre des infrastructures terroristes du Hezbollah dans le sud du Liban.
Cette offensive marque une escalade des tensions entre Israël et le groupe islamiste libanais, alors que les combats se sont intensifiés au sud du Liban.
Emmanuel Razavi, grand reporter, expert du Moyen-Orient et auteur du livre “La Face cachée des Mollahs – L’enquête exclusive sur la République islamique d’Iran” (Le Cerf, Janvier 2024), nous en dit plus sur les enjeux de l’opération en cours…
Raids localisés dans les villages du sud du Liban
L’armée israélienne, par le biais d’une déclaration sur Telegram, a indiqué dans la nuit que ses forces ont commencé « des raids terrestres limités, localisés et ciblés » dans des villages proches de la frontière sud du Liban. Ces opérations, selon Tsahal, visent des infrastructures du Hezbollah qui représentent une menace directe pour les communautés israéliennes du nord.
Selon Emmanuel Razavi, « les objectifs sont à la fois militaires et géopolitiques. Le premier objectif est de détruire tous les relais paramilitaires, terroristes et de renseignement de la République islamique d’Iran au-delà de ses frontières. Il faut avoir en tête que le Hezbollah n’est pas un proxy comme les autres, c’est une réplique du corps des gardiens de la révolution islamique au Liban ».
Le renseignement israélien tente de redorer son blason au Liban
Conformément à un plan militaire méthodique, les forces de défense israéliennes affirment agir sur la base de renseignements précis, avec l’objectif de réduire les capacités militaires du Hezbollah. L’artillerie et les forces aériennes israéliennes soutiennent ces opérations terrestres par des frappes ciblées, dans le cadre d’une campagne militaire de grande envergure.
« Il y a un enjeu politique pour Netanyahou qui a été très critiqué depuis le 7 octobre pour ses failles en matière de renseignement. Là, il est en train de montrer que le renseignement israélien est toujours extrêmement fort et que des opérations long-terme ont permis d’infiltrer tant la République islamique d’Iran que le Hezbollah », ajoute Emmanuel Razavi.
L’offensive menée par l’élite militaire israélienne
Parallèlement aux opérations contre le Hezbollah, un camp de réfugiés palestiniens à Sidon a été ciblé par une frappe israélienne. Un responsable du camp a déclaré que l’attaque visait la maison du fils de Mounir Maqdah, figure importante de la branche armée du mouvement palestinien Fatah.
Israël accuse Mounir Maqdah d’être en lien avec les gardiens de la révolution islamique iraniens et de participer à l’organisation d’attaques terroristes. Cette frappe intervient après qu’Israël avait déjà tué Khalil Maqdah, le frère de Mounir, en août dernier.
L’incursion terrestre dans le sud du Liban est menée par la 98ᵉ division de Tsahal, une unité d’élite réputée pour ses missions complexes. Cette division regroupe des parachutistes, des commandos de la Shayetet 13, et la 7ᵉ brigade blindée. Ces forces d’élite, sous le commandement du général de brigade Guy Levi, avaient auparavant été mobilisées pour des opérations de récupération d’otages à Gaza.
Asphyxier le Hezbollah pour combattre l’Iran
Les récentes frappes israéliennes contre le Hezbollah au Liban ont non seulement visé des infrastructures militaires, mais ont aussi porté un coup sévère aux sources de financement de l’organisation, notamment en perturbant ses financements via les activités illégales à l’échelle mondiale.
« Depuis trois décennies, l’organisation islamiste chiite a financé ses activités à travers divers trafics, dont une part importante provient du trafic de drogue à grande échelle. Les récentes frappes ont ciblé des responsables clés du Hezbollah, y compris des commandants iraniens de la Force Al-Qods, qui coordonnent les activités paramilitaires et terroristes en lien avec l’Iran. Ces hommes étaient en relation directe avec des cartels sud-américains, permettant ainsi au Hezbollah de bénéficier de fonds substantiels. Aujourd’hui, ces contacts sont rompus, voire perdus, affaiblissant considérablement le financement narco de l’organisation terroriste », précise Emmanuel Razavi.
Bien que durement touché, le Hezbollah reste une menace pour Israël. Son organisation a subi d’importants dommages, spécifiquement sur ses moyens de communication et de renseignement, ainsi que des pertes significatives en termes de matériel militaire. « La marge de manœuvre du Hezbollah est extrêmement faible », affirme notre expert, suggérant que l’organisation pourrait désormais être contrainte de se recentrer sur ses activités politiques. Toutefois, il est fort probable que le Hezbollah riposte en ayant recours à sa tactique traditionnelle : le terrorisme. « C’est leur marque de fabrique », ajoutent-ils, anticipant ainsi une éventuelle réponse violente aux frappes israéliennes.
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