Saisi de la question par Emmanuel Macron, le Conseil constitutionnel rendra en cet après-midi de jeudi 25 janvier 2024 sa décision sur la loi immigration.
Rappelez-vous, à peine quelques jours après l’adoption par l’Assemblée Nationale de la loi immigration visant à « contrôler l’immigration, améliorer l’intégration », quatre saisines tombaient. Le Président de la République, la Présidente de l’Assemblée Nationale, 60 députés et 60 sénateurs saisissaient alors le Conseil constitutionnel dans l’espoir, pour la gauche surtout, de vider la loi de sa substance. Mais qu’en est-il vraiment ?
Cavalier législatif, droit à une vie familiale normale, principes et valeurs de la République, les petits hommes gris fidèles à notre grand remplacement se tiennent prêt à censurer le peu d’avancées que contient cette loi immigration. Ainsi, ne restera, après le passage du Conseil constitutionnel, que la régularisation des travailleurs sans papiers (des métiers en tension). Il est là le fameux « virage à droite » de la Macronie…
Loi immigration : un démembrement annoncé
Sur X (ex-Twitter) l’avocat Pierre Gentillet est revenu sur les éléments de cette loi susceptibles d’êtres censurés :
« Obligation d’un débat annuel au Parlement sur l’immigration (L.123.2). La loi prévoit que les orientations pluriannuelles de la politique d’immigration et d’intégration feront l’objet d’un débat au Parlement (article 1er). Le gouvernement devra remettre au Parlement, avant le 1ᵉʳ juin de chaque année, un rapport indiquant et commentant, pour les dix années précédentes, des données chiffrées sur l’immigration ». Deux raisons peuvent fonder la censure d’un tel article. Premièrement, l’imposition d’un tel débat annuel constitue une limitation des prérogatives du parlement que la constitution ne lui accorde pas. Voici ce qu’en disait déjà le Conseil constitutionnel en 2000 : « Considérant qu’en l’absence de dispositions constitutionnelles l’y autorisant, il n’appartient pas au législateur d’imposer l’organisation d’un débat en séance publique ; qu’une telle obligation pourrait faire obstacle aux prérogatives que le Gouvernement ou chacune des assemblées, selon les cas, tiennent de la Constitution pour la fixation de l’ordre du jour ». Deuxièmement, le parlement ne pourrait fixer de tels quotas et donc refuser l’entrée d’individus sur le sol français pour des raisons familiales. Ce droit de mener une vie familiale normale est consacré depuis longtemps par le Conseil constitutionnel (93-325 DC, 13 août 1993).
« L’obligation pour les étudiants étrangers de déposer une caution pour obtenir une carte de séjour » : Deux raisons peuvent fonder la censure d’un tel article. Premièrement, atteinte au principe d’égalité, en particulier d’accès à l’enseignement. Deuxièmement, atteinte au principe d’autonomie des universités, car c’est un choix qui devrait logiquement leur revenir.
Que restera-t-il de cette loi ?
« Suppression de la réduction de prix sur les transports en commun pour les sans-papiers » : Censure potentielle pour cet article puisqu’il s’agit ici en réalité de la tarification sociale, mesure réservée aux personnes disposant de faibles ressources. Ici, la différence de traitement ne se justifie pas par un motif d’ordre public, mais un pur choix arbitraire.
« Un droit au logement opposable pour les étrangers résidant en France depuis au moins cinq ans » : Après cette loi, les étrangers non ressortissants de l’Union européenne (UE) ne pourront plus profiter au droit opposable au logement sauf s’ils résident en France depuis au moins 5 ans ou justifient d’une durée d’affiliation d’au moins 30 mois (article 19). Deux raisons peuvent fonder la censure d’un tel article. Premièrement, il s’agit d’une restriction injustifiée et disproportionnée au droit au logement, droit à valeur constitutionnelle (Décision n° 94-359 DC du 19 janvier 1995). Deuxièmement, il y a rupture du principe d’égalité. Celui-ci peut se justifier par un motif d’ordre public, ce qui n’est pas avancé dans la loi.
« Restriction d’accès aux allocations familiales » : La loi prévoit que le bénéfice des prestations familiales sera réservé aux personnes résidant en France de manière régulière depuis au moins 5 ans ou justifiant d’une durée d’affiliation à la Sécurité sociale d’au moins 30 mois au titre d’une activité professionnelle dans le pays (article 19). Cet article sera sûrement supprimé, car il viole le principe d’égalité face aux prestations sociales entre résidents français et étrangers posé depuis longtemps par le Conseil constitutionnel (Décision n° 89-269 DC du 22 janvier 1990).
Enfin, les dispositions relatives aux nouvelles règles d’acquisition de la nationalité française ainsi que le nouveau motif de déchéance de la nationalité peuvent également être considérés par le Conseil constitutionnel comme des cavaliers législatifs. En effet, il ne s’agit pas d’un projet de loi sur l’accession de la nationalité, mais sur la maîtrise de l’immigration. Cette différence, certes peu visible, peut constituer un cavalier législatif.