Politique
[Édito] Discours de Gabriel Attal : un second souffle peu inspiré
En parlant vite et fort lors de son discours de politique générale, Gabriel Attal a sans doute cherché à masquer le vide que cachait sa volubilité. On y a relevé plus de slogans que de propositions.
« Déverrouiller », « désmicardiser », « débureaucratiser » : voici les trois mots que Gabriel Attal a martelés tout au long de son discours de politique générale. Avec son « de l’action, de l’action, de l’action », on comprend d’abord que le néo-Premier ministre aime les tercets, qu’il a sa propre Trinité.
Des slogans comme ceux-ci, on a en reçu à la pelle durant la petite heure et demie qu’a duré son discours. Malheureusement, la tare est répandue dans la majorité, on dénombre plus de formules creuses que de propositions concrètes.
Le changement, ce n’est pas pour maintenant
Au cas-où sa conférence de presse du 16 janvier n’avait pas été assez claire, un virage sémantique vers la droite a été confirmé par le Premier ministre, pourtant ancien du Parti Socialiste. On a pu entendre à plusieurs reprises les termes « identité » ou « souveraineté », voire celui de « France-archipel » : tout sauf un hasard.
En axant son discours sur « l’autorité » (« de l’ordre, de l’ordre, de l’ordre » tonnait Macron il y a quinze jours), Gabriel Attal montre bien qu’il ne chasse pas à gauche, mais au centre et à droite. L’autorité, on l’entend dans ses mots durs, on la voit moins dans les actes. Contrairement à ce que peut penser Attal, interdire l’abaya ne fait pas de vous un homme de droite, et ce n’est pas en expliquant, six mois après les émeutes, semestre de profonde réflexion, que les délinquants de moins de seize ans allaient désormais devoir faire des « travaux d’intérêt éducatif » selon le principe : « Tu casses, tu répares. Tu salis, tu nettoies. », comme mesure forte, on a vu mieux. Le « choc d’autorité » tant plébiscité par l’avocat et membre de notre comité stratégique Thibault de Montbrial ne semble pas être pour tout de suite.
Au contraire, Attal n’a pas hésité à reprendre l’absconse terminologie de « choc des savoirs » pour définir sa politique éducative. Au vu des nombreuses affaires entourant sa ministre de l’Éducation nationale Amélie Oudéa-Castéra, on ne peut que constater une forme de joyeuse continuité, presque de routine avec les gouvernements précédents.
« Moins d’Europe, c’est moins de puissance pour la France » : avec cette phrase qui n’en a sans doute pas converti les foules, le soldat d’Emmanuel Macron renoue avec la politique de son commandant. Effectivement, après tous les revirements et les « en même temps », on retrouve une seule constante chez Macron : son soutien indéfectible à l’Union européenne. C’est d’ailleurs le point sur lequel Attal avait refusé de se remettre en question lors de son discours aux agriculteurs : les traités de libre-échange votés au Parlement européen et largement soutenus par Renew, aux racines de la colère paysanne de ces dernières semaines.
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Attal, ce deuxième Macron
« Je suis né en 1989 » a entamé le nouveau chef du gouvernement, en guise d’incipit de son discours. Les références à sa jeunesse ont d’ailleurs été nombreuses : « je connais ma génération » a-t-il par exemple déclaré, oubliant manifestement que justement, sa génération vote en fait assez peu pour Renaissance.
La jeunesse de Gabriel Attal est peut-être un atout pour une bonne partie des boomers protégés à tout prix par le gouvernement à coup d’augmentation du montant de la retraite, qui le voient comme un « Macron en plus jeune », mais est assez loin de séduire le reste de la population. Selon un sondage du Figaro publié ce 31 janvier, la côte de confiance du nouveau Premier ministre est à 33 %, soit seize points de moins qu’Edouard Philippe à la même date, et autant que Jean Castex.
Or, contrairement aux deux personnages précédents, Attal est loin d’être un inconnu. Alors qu’Elisabeth Borne, elle, incarnait une forme de froideur technocratique, mais demeurait une figure centrale et discrète, Gabriel Attal, lui, se doit de donner un nouvel élan, un second souffle au deuxième mandat d’Emmanuel Macron.
Ce second souffle, s’il existe, ne promet pas de nouvelles inspirations. Alors que le Premier ministre était, dès l’origine, caricaturé en « mini-Macron », son discours de politique générale a plus les airs d’un pâle écho, d’une répétition de la conférence de presse du 16 janvier. Comme Bruno Le Maire répétait le discours d’Attal au Sénat, Attal répétait le discours de Macron à l’Assemblée. Manquant de personnalité, froid et assez fébrile, on a comme l’impression que si la jeunesse donne des ailes, elle ne donne pas forcément les épaules.
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2 commentaires
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