Fabien Bouglé expert en politique énergétique : « Nous assistons au début de la guerre de l’énergie ! »
Fabien Bouglé, expert en politique énergétique, a accordé un entretien à Frontières. Lors de cet échange, il a abordé les déclarations de la directrice générale d’Engie concernant la souveraineté énergétique de la France, tout en soulignant les risques de conflits énergétiques à l’échelle européenne. Il a également évoqué les dynamiques complexes entre Donald Trump et Vladimir Poutine dans ce contexte.
Cet entretien a été réalisé dans le cadre de notre matinale
Comment réagissez-vous aux propos de Madame Mac Gregor, directrice générale d’Engie, qui a récemment souligné l’importance pour la France de garantir sa souveraineté énergétique ?
Je suis heureux de constater que Mme MacGregor adhère à la thèse que j’ai développée dans mon livre Guerre de l’énergie au cœur du nouveau conflit mondial, où j’explique notre passage d’une dépendance gazière envers la Russie à une dépendance similaire envers les États-Unis. Ses propos récents confirment cette vision et me satisfont. Cependant, je considère qu’elle commet une erreur lorsqu’elle envisage de contrer cette dépendance en renforçant la transition énergétique.
En ce qui concerne la décarbonation, il est important de clarifier le sens de « transition énergétique ». En réalité, ce terme est la traduction de « Energiewende » allemande, qui signifie la sortie non seulement des énergies fossiles, mais aussi du nucléaire. Cette politique, suivie par l’Allemagne, a conduit à des résultats désastreux : en combinant charbon et énergies renouvelables, avec les éoliennes et les panneaux solaires couvrant 30 à 40 % de leur mix électrique, l’Allemagne émet aujourd’hui 10 à 20 fois plus de gaz à effet de serre que la France. On peut donc affirmer que, sous cet angle, la transition énergétique est un échec.
Par ailleurs, il est essentiel de rappeler que Donald Trump, dont l’élection peut être vue favorablement sur certains aspects sociétaux face à Kamala Harris, ne sera pas conciliant avec l’Europe en matière de politique énergétique. C’est dans ce contexte que Mme MacGregor a réagi, et je salue cette prise de conscience, même si elle n’apporte pas, à mon sens, la bonne réponse à la guerre énergétique qui s’annonce avec les États-Unis.
L’élection de Donald Trump ne risque-t-elle pas de pousser la France et l’Europe à renforcer leur souveraineté énergétique ?
Il est essentiel de saisir une notion fondamentale : d’un côté, la Russie est depuis des années autonome sur le plan énergétique, disposant de ses propres ressources et n’ayant donc pas besoin d’importer de l’énergie. De l’autre côté, les États-Unis sont également devenus autonomes énergétiquement depuis 2016, leurs exportations dépassant leurs importations. Cela ne signifie pas qu’ils n’importent pas de pétrole, mais l’essentiel de leur consommation est couverte par une balance excédentaire.
Ce tournant énergétique pour les États-Unis intervient en 2016, avec l’arrivée de Donald Trump au pouvoir. Durant son mandat de 2016 à 2020, Trump adopte la doctrine du « freedom gas », ou « gaz de la liberté ». À ses yeux, cet excédent énergétique permet de contrebalancer les exportations de gaz russe. Dans ce contexte, il développe fortement les capacités de production de gaz naturel liquéfié (GNL), un procédé permettant de liquéfier le gaz en le passant de 600 m³ gazeux à 1 m³ liquide, facilitant ainsi son transport par méthaniers, puisqu’il est impossible pour les États-Unis de le distribuer en Europe ou en Chine via gazoducs.
La Russie, de son côté, a renforcé sa stratégie géopolitique en multipliant les gazoducs, dont le principal traverse l’Ukraine, et en étendant son réseau pour asseoir son influence énergétique. Ainsi, durant son mandat, Trump a adopté deux « bras armés » pour renforcer la souveraineté énergétique américaine : l’augmentation des capacités de gaz naturel liquéfié, et le développement du nucléaire aux États-Unis.
Il est important de comprendre le rôle crucial que jouent les « molécules de la liberté ». Le programme de Donald Trump est très clair : s’il est élu, il poursuivra sans ambiguïté sa politique de « freedom gas », initiée entre 2016 et 2020. Pire encore pour le secteur du nucléaire français, Trump envisage de mettre en place des dispositifs visant à sanctionner ce dernier.
Dans les médias français et américains, Donald Trump et Vladimir Poutine sont souvent dépeints comme de grands alliés. Dans le contexte du conflit énergétique à venir, qui sera crucial pour l’économie russe et nécessitera de fixer les prix mondiaux du pétrole et du gaz, comment cette relation entre Donald Trump et Vladimir Poutine pourrait-elle évoluer ?
Nous assistons au début de la guerre de l’énergie. En effet, Donald Trump semble désireux de mettre fin à la guerre en Ukraine, notamment parce que, de manière générale, les républicains ne sont pas interventionnistes. Cependant, Vladimir Poutine pourrait en profiter pour négocier un cessez-le-feu en Ukraine, tout en relançant l’approvisionnement en gaz via les gazoducs Nord Stream 1 et 2.
Il faut savoir qu’un des quatre tuyaux reste encore opérationnel, permettant de transporter 27,5 milliards de mètres cubes de gaz entre la Russie et l’Europe. Bien que ce gaz ne transite plus actuellement, le robinet pourrait se rouvrir du jour au lendemain, rendant à nouveau fonctionnels ces gazoducs. L’Allemagne en a particulièrement besoin, ce qui explique les tensions internes actuelles. Certains plaident pour la reprise des importations de gaz russe afin de faire face à la crise énergétique.
Il est cependant évident qu’à terme, pour éviter que l’Europe ne paie une facture énergétique trop élevée, ce qui pénalise la compétitivité industrielle, il sera nécessaire de diversifier nos sources d’approvisionnement en gaz. Il est donc impératif, sans détour, de renouer des relations commerciales avec la Russie pour acheter du gaz, tout en renforçant nos importations de gaz américain. Cette diversification, en encourageant la concurrence entre fournisseurs, pourrait permettre de réduire notre facture énergétique. Cela est d’autant plus crucial que le marché européen de l’électricité fonctionne sur le principe de l’unité de production la plus chère. Ainsi, lorsque le prix du gaz augmente, cela impacte directement le coût de l’électricité en Europe.
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