La galaxie trotskiste et ses nouvelles luttes

Le trotskisme, c’est d’abord une mythologie forgée par le regard extrêmement bienveillant que porte la plupart des anciens militants sur leurs engagements de jeunesse. La nostalgie efface les zones d’ombre pour ne laisser qu’une image très idéalisée de Trotski : intellectuel proche des ouvriers comme des artistes, révolutionnaire éclairé qui a dénoncé le stalinisme, martyr assassiné le 21 août 1940 sur ordre de Staline par un agent du NKVD (ancêtre du KGB et du FSB). Si tout cela est exact, cela ne fait pourtant pas du fondateur de la IVe Internationale le doux agneau qu’aiment nous présenter les anciens de « la cause ». Rappelons que c’est lui qui a fondé, en 1918, l’Armée rouge pour qu’elle inspire, à l’extérieur de la future URSS comme à l’intérieur de ses frontières, « la terreur rouge ». En mars 1921, il écrasera d’ailleurs dans le sang la révolte des marins soviétiques de Kronstadt. La répression fera plusieurs milliers de morts. Il est également l’un des pionniers de la défense théorique du terrorisme et de la pratique de la violence politique dans son livre Terrorisme et communisme, intitulé plus tard Défense du terrorisme. 

Sur les principes, le trotskisme reste un courant marxiste-révolutionnaire qui souhaite revenir aux sources du léninisme ; on parle quelquefois de bolchevisme-léninisme. Contrairement au stalinisme, qui prônait, pour commencer, d’imposer et de construire le socialisme dans un seul pays, le trotskisme repose sur une stratégie internationale de la « révolution permanente ». Celle-ci doit être, selon Trotski, qui en dessine les contours dès 1905, internationale et ininterrompue. L’effacement des combats et des organisations nationales au profit de structures internationales et de la révolution mondiale est ainsi au cœur du projet trotskiste. C’est en France, alors qu’il y est en exil, qu’il fondera, le 3 septembre 1938, la IVe Internationale, à laquelle se réfèrent toujours les mouvements trotskistes.