Politique
Report du projet de loi agricole : « on n’attendra pas pour être dans la rue »
Dans les champs français, la colère gronde et la patience des agriculteurs atteint ses limites. Ce dimanche, Yaël Braun-Pivet, présidente de l’Assemblée nationale, a reconnu avec regret que le projet de loi d’orientation agricole, attendu comme une bouffée d’oxygène par des milliers d’agriculteurs, ne reviendra sur les bancs du Parlement qu’au début de l’année 2025.
Pourtant, lors d’une interview sur France 3, elle ne manque pas de rappeler son propre engagement envers les agriculteurs en septembre pour tenter de faire avancer l’examen en session extraordinaire du haut de son perchoir. Mission impossible de dégager le temps nécessaire pour une loi aussi technique, alors que le vote du budget est déjà noyé sous quelque 1500 amendements.
Le gouvernement reporte malgré l’urgence
Pour la présidente de l’Assemblée, cette loi est « urgente ». Les agriculteurs, eux, le savent depuis longtemps. Entre la météo capricieuse et les rendements en baisse, puis la crise sanitaire qui touche l’élevage, l’année 2024 ne leur aura rien épargné. Et comme si cela ne suffisait pas, la perspective de l’accord du Mercosur, prévu pour novembre, vient ajouter la colère à la frustration d’un secteur déjà à bout de souffle.
« Je regrette que le gouvernement ait fait le choix d’examiner cette loi d’orientation agricole uniquement en début d’année 2025. Je crois que c’est urgent », confie Yaël Braun-Pivet. Le signal d’alerte n’est pas nouveau. Le projet de loi, censé renforcer la souveraineté alimentaire, former les agriculteurs de demain et simplifier la réglementation, traîne sur les étagères depuis son interruption au Sénat en mai dernier, suite à la dissolution. Il devait répondre aux manifestations agricoles d’ampleur qui ont secoué le pays au printemps.
Dans les rangs des députés, quelques voix s’indignent timidement. À commencer par Marc Fesneau, chef des députés MoDem et ancien ministre de l’Agriculture, qui estime qu’il est « dommage que l’on attende janvier ». Peut-être a-t-il raison de s’inquiéter.
« C’est un agricide » : le cri de désespoir des agriculteurs
La FNSEA, le syndicat majoritaire, ne l’entend pas de cette oreille et a lancé un appel à « une action nationale (…) à partir de la mi-novembre ». Son président, Arnaud Rousseau, est prêt « à aller loin pour que (ses) revendications soient entendues ». De son côté, Véronique Le Floc’h, présidente de la Coordination Rurale, ne cache plus son exaspération : « On est à un stade où plus personne n’a rien à perdre. C’est un agricide. Nos politiques n’ont pas conscience de l’ampleur de cette crise. On n’attendra pas le 15 novembre pour être dans la rue. C’est trop tard. »
🔴🔴” On est à un stade où plus personne n’a rien à perdre. C’est un agricide. Nos politiques n’ont pas conscience de l’ampleur de cette crise. On attendra pas le 15 novembre pour être dans la rue. C’est trop tard”
Intervient Véronique Le Floc’h, présidente de la Coordination… pic.twitter.com/XtszYJRKyj— Coordination Rurale (@coordinationrur) October 23, 2024
Les protestations ont d’ailleurs déjà commencé ici et là, signes avant-coureurs d’un mécontentement qui pourrait rapidement s’étendre. Le projet de loi, conçu pour apporter un peu de stabilité à un secteur qui vacille, prend désormais des allures de mirage pour des agriculteurs fatigués des promesses et des reports. Le gouvernement, lui, semble rester sourd, laissant planer l’idée que le monde agricole peut encore attendre un peu, en espérant qu’il ne s’effondrera pas d’ici là.
Pas de longs cortèges de tracteurs à Périgueux. Une trentaine d’exploitants de la Coordination rurale ont manifesté en choisissant un symbole fort, ce vendredi 25 octobre devant la préfecture.
🔗https://t.co/BovN6qadSc pic.twitter.com/6bX0LQmXuR— Sud Ouest (@sudouest) October 25, 2024
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