Politique
Mayotte : le débat sur la fin du droit du sol relancé
Mayotte, frappée de plein fouet par le cyclone Chido, est à nouveau au cœur des débats sur l’immigration. Annoncé en février dernier, le projet de mettre fin au droit du sol a été abandonné avec la dissolution, mais la question reste plus que jamais d’actualité. L’archipel, devenu département français en 2011 et situé à moins de 70 kilomètres des Comores, fait face depuis des années à une grave crise migratoire.
« Quiconque prétendrait qu’il n’y a pas un problème d’immigration brûlant à Mayotte serait irresponsable », a déclaré François Bayrou ce lundi 30 décembre, après une visite de l’hôpital de campagne à Mamoudzou, évoquant également la question de la fin du droit du sol. « C’est une question qu’il faut poser », a ajouté le Premier ministre, en précisant que « cela se ferait au Parlement, au Sénat et à l’Assemblée nationale, via des propositions de loi qui isoleront des sujets de blocage » dans un « dialogue avec toutes les forces politiques ». Si le sujet reste particulièrement sensible, il n’est pas nouveau pour autant.
Mayotte : «Il faut se poser la question du droit du sol», explique François Bayrou pic.twitter.com/n4UTiIWIYs
— CNEWS (@CNEWS) December 30, 2024
Les règles du droit du sol déjà modifiées en 2018
Contrairement à une idée reçue, le droit du sol en France n’est pas absolu. En métropole, un enfant né de parents étrangers peut devenir français à ses 18 ans, à condition d’avoir vécu sur le territoire pendant au moins cinq ans depuis ses 11 ans. Il est également possible d’obtenir la nationalité avant la majorité, sous réserve de remplir des conditions liées à la durée de résidence en France.
À Mayotte, où la pression migratoire est particulièrement forte, une loi adoptée en 2018 a durci les règles. Désormais, pour qu’un enfant né sur place puisse obtenir la nationalité française, l’un de ses parents doit résider légalement et de manière stable sur l’île depuis au moins trois mois avant sa naissance.
La fi du droit du sol à Mayotte, une promesse d’avant la dissolution
En février dernier, lors d’un déplacement dans le 101e département français, Gérald Darmanin promet « l’inscription de la fin du droit du sol à Mayotte dans une révision constitutionnelle ».
À situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles. À la demande du Président de la République, nous annonçons avec @mguevenoux la fin du droit du sol Mayotte, l’application immédiate des restrictions du regroupement familial prévues dans la loi immigration, la fin des visas… pic.twitter.com/iJ9nWWyPlN
— Gérald DARMANIN (@GDarmanin) February 11, 2024
L’ancien ministre de l’Intérieur annonce sur le tarmac de l’aéroport de Mamoudzou qu’« il ne serait plus possible de venir à Mayotte de façon régulière ou irrégulière, de mettre un enfant au monde ici et d’espérer devenir français de cette façon », précisant souhaiter ainsi « couper l’attractivité de l’archipel mahorais ». Cette annonce a déclenché un tollé dans les milieux associatifs et politiques. Mais fin juin, la dissolution a brutalement enterré le projet.
Une proposition de loi déposée en septembre par Estelle Youssouffa
Le dossier n’est pourtant pas clos. Le 27 septembre, la députée Liot de Mayotte, Estelle Youssouffa, dépose à l’Assemblée sa propre proposition de loi constitutionnelle sur le sujet, « visant à abroger le droit du sol et le double droit du sol à Mayotte ». « L’objectif de la loi n’a pas été atteint », indique la parlementaire mahoraise. Elle précise que le texte a même conduit à une hausse des reconnaissances frauduleuses de paternité pour contourner les restrictions.
Mamoudzou, symbole de la pression démographique
Aujourd’hui, le véritable indicateur se situe à Mamoudzou. Avec plus de 10 000 naissances par an, elle devient la première maternité de France. Une étude menée en 2021 par l’Agence régionale de santé et Santé publique France et publiée en septembre 2023 révèle que 74 % des femmes qui accouchent dans l’archipel sont étrangères, principalement des Comoriennes (67,6 %). Ce constat s’explique en partie par le fait que 85 % des titres de séjour délivrés à Mayotte relèvent de l’immigration familiale.
« Il faut maintenant que la proposition de loi constitutionnelle soit inscrite à l’agenda, soit par mon groupe, soit par la présidence de l’Assemblée nationale, soit par le gouvernement », explique-t-elle en octobre au Journal de Mayotte. « Ensuite, il faut que les trois cinquièmes du Parlement l’adoptent, ou qu’elle soit proposée par référendum. »
Mi-décembre, Bruno Retailleau relance la polémique
Mi-décembre, Bruno Retailleau verse lui aussi dans la polémique. « On ne pourra pas reconstruire Mayotte sans traiter, avec la plus grande détermination, la question migratoire. Il faudra légiférer pour qu’à Mayotte, comme partout sur le territoire national, la France reprenne le contrôle de son immigration », publie-t-il sur X.
Ce qui attend la France à Mayotte est colossal : l’île est dévastée.
L’État est mobilisé depuis la première heure pour secourir les victimes et éviter que d’autres crises n’ajoutent encore au malheur.
Mais il faut déjà penser au jour d’après. On ne pourra pas reconstruire…
— Bruno Retailleau (@BrunoRetailleau) December 17, 2024
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