Il n’y aura pas d’agriculture pérenne sans reprendre le contrôle sur Bruxelles
Tribune de Charles-Henri Gallois, président de Génération Frexit, économiste et auteur de Nos grands défis du XXIe siècle : Énergie et immigration: Reprenons le contrôle !
La macronie essaie tant bien que mal de sortir de cette crise du monde agricole. Elle a annoncé le jeudi 1ᵉʳ février des aides pour près de 400 millions d’euros et une prétendue suspension de l’accorde de libre-échange avec le MERCOSUR ainsi qu’une pause des surtranspositions. Les syndicats de la FNSEA et des jeunes agriculteurs, alliés objectifs de la Macronie, ont annoncé une fin des blocages.
Il ne faut pas s’y tromper, ces mesurettes de court terme ne changeront rien aux problèmes de long terme de nos agriculteurs.
Le gouvernement fait de la cosmétique mais n’a pas les manettes face à Bruxelles qui décide de l’essentiel de ce qui se joue pour nos agriculteurs. Le seul levier national est d’arrêter et de revenir sur la surtransposition.
Pour ce qui est des aides nationales, il faut se méfier puisqu’en 2009, Bruxelles avait réclamé le remboursement de plus de 300 millions d’euros de subventions nationales accordées à la filière fruits et légumes entre 1992 et 2002. Dans le monde bruxellois, toute aide nationale est potentiellement perçue comme une distorsion de concurrence du marché européen.
L’UE n’est pas la solution, mais le problème de l’agriculture
Et surtout, quels sont les deux problèmes insolubles des agriculteurs français ? On leur impose des normes européennes sans cesse plus contraignantes et coûteuses, et dans le même temps, on les expose à une concurrence déloyale avec des produits importés qui ne respectent pas les mêmes normes sociales et environnementales dans le cadre du libre-échange tous azimuts de l’UE. Ces deux données de long terme, en plus du programme européen décroissant « Farm to Fork » qui provoquera une baisse de la production alimentaire de l’ordre de 10 à 20 % à horizon 2030, entraîneront inéluctablement la mort de notre agriculture.
En ce qui concerne les normes européennes, le gouvernement n’a aucun levier sur toutes les normes passées. C’est exactement la même chose en matière de libre-échange : la politique commerciale est une compétence exclusive de l’UE. Il n’y a pas de retour en arrière possible en restant dans ce cadre. Il y a une hypocrisie insupportable de la macronie sur le libre-échange. Ils prétendent arrêter l’accord avec le MERCOSUR mais ses députés viennent tout juste de voter en faveur d’un accord de libre-échange avec la Nouvelle-Zélande et avec le Chili. Pour ce qui est de celui avec le MERCOSUR, ils semblent gagner du temps avec les élections européennes. Emmanuel Macron a précisé qu’il ne signerait pas « en l’état » : ce qui veut dire qu’il ne le signera probablement après les élections à la faveur de concessions cosmétiques. L’UE a déjà ouvert les vannes à l’Ukraine qui constitue une concurrence déloyale et une vraie menace à la fois pour nos éleveurs de volailles mais aussi pour nos céréaliers. L’UE est constante dans la négociation des accords de libre-échange : sacrifier l’agriculture, et en particulier l’élevage, pour vendre des produits industriels allemands.
En matière de libre-échange, la Macronie est aussi crédible pour la défense de nos agriculteurs que si elle nommait Frédéric Beigbeder ou Renaud ministre des sports.
Reprendre le contrôle par la souveraineté alimentaire
Enfin, en ce qui concerne le fameux gazole non routier qui a mis le feu aux poudres et est à l’origine du soulèvement, le gouvernement a décidé de ne pas augmenter la fiscalité. Cela semble là aussi être une mesure de court terme puisqu’une directive européenne de 2021 (2021/0213) exige de ne plus faire de distinction entre l’utilisation professionnelle et non professionnelle des combustibles et de l’électricité. Le gouvernement français a anticipé cette directive mais dès qu’elle entrera en vigueur, elle devra s’y conformer au bout de quelques années sous peine d’amende. Là encore, ils ne font que reculer un problème qui se posera inéluctablement.
L’agriculture, secteur primaire, est la base de notre souveraineté. La souveraineté alimentaire ne devrait même pas être un débat mais un acquis. La macronie paraît le découvrir. Gabriel Attal parle désormais de mettre dans la loi la souveraineté alimentaire. Là aussi il se moque du monde, puisque les traités, et notamment les traités de libre-échange, ont une valeur juridique supérieure à la loi. Il n’y aura pas de « réarmement agricole » dans le cadre de l’UE.
Le seul argument qui reste aux partisans de l’UE, c’est de nous expliquer que la France touche près de 9 milliards d’euros par an du fait de la Politique agricole commune. C’est se moquer du monde ! La PAC est en baisse constante dans le budget de l’UE, avec dernièrement une diminution de 16 % pour la période 2021-2027. Mais surtout, c’est oublier la structure globale du budget de l’UE. La France donne bon an mal an près de 10 milliards en plus à l’Union européenne que ce qu’elle reçoit. En 2021, la France a donné 28,1 milliards d’euros à l’UE pour n’en recevoir que 15,7 milliards dont la PAC ! La belle affaire ! En réalité, la PAC est de l’argent français et on nous pique chaque année en plus un montant à peu près équivalent. Dire que l’agriculture française survit grâce à l’argent de la PAC, c’est d’une malhonnêteté intellectuelle sans nom !
Vous l’avez bien compris, pour nos agriculteurs, l’UE n’est sûrement pas la solution mais bien le problème. Il n’y aura pas de solution de long terme pour le monde agricole si l’on ne reprend pas le contrôle sur Bruxelles.
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