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Nouvelle-Calédonie : les Kanaks craignent-ils un grand remplacement électoral ?

Émeutes, blessés, gendarme décédé, pillages, depuis deux nuits, la Nouvelle-Calédonie est le théâtre de violentes insurrections qui interviennent après le vote à l’Assemblée d’une réforme sur le régime électoral de l’île. Sur place, les Kanaks majoritairement indépendantistes craignent une perte de souveraineté.

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Nouvelle-Calédonie : les Kanaks craignent-ils un grand remplacement électoral ?

Malgré les tensions qui règnent depuis deux nuits en Nouvelle-Calédonie, un territoire français constitué d’une dizaine d’îles, le vote qui s’est déroulé hier, mardi 14 mai 2024 à l’Assemblée nationale, a abouti à l’adoption du projet de révision de la Constitution par 351 voix contre 153. Cette réforme vise principalement à réviser le régime électoral spécifique en place depuis l’accord de Nouméa de 1998. Son objectif est d’étendre le droit de vote à de nouveaux électeurs, notamment à ceux résidant sur le territoire depuis dix ans.

Réforme : une confiscation de la souveraineté pour les Kanaks ?

Sur place, les non-indépendantistes soutiennent cette réforme en revendiquant “les mêmes droits” que dans d’autres régions du pays, surtout après trois référendums où le “non” à l’indépendance l’a emporté. Cependant, les craintes persistent parmi leurs adversaires quant à la possible « dilution », comprenez grand remplacement des Kanaks dans un électorat élargi, ce qui motive leur demande de retrait du texte. En effet, les militants indépendantistes refusent d’accepter que la souveraineté leur soit « confisquée ». « Cette France peut tout nous prendre, mais elle ne nous prendra pas notre liberté et notre farouche volonté d’émancipation » avait déclaré Daniel GOA, lors du discours d’ouverture de la présidence de l’Union Calédonienne, le 29 juillet 2023. La députée de la France Insoumise Andrée Taurinya a indiqué sur X (ex-Twitter) :tout le monde savait que mettre le peuple kanak en minorité sur ses terres conduirait à sa colère“. La gauche Insoumise semble prompte a dénoncer un grand remplacement sauf lorsque celui-ci concerne la métropole et plus largement l’Europe.

La Nouvelle-Calédonie divisée entre nord et sud

Pour rappel, il y a eu 3 référendums sur l’indépendance de l’île entre 2018 et 2021. Lors du premier référendum en 2018, la participation est de 81 %. Le OUI à l’indépendance obtient 43,33 % contre 56,67 % pour le NON. À noter la participation importante des jeunes Kanak et la séparation du territoire en deux blocs : d’une part le sud de la Grande Terre où le NON des loyalistes est majoritaire et de l’autre le nord et les îles Loyauté où les votants sont principalement Kanaks et indépendantistes. Le deuxième référendum qui s’est tenu en octobre 2020, voit le OUI recueillir 46,74 % des suffrages. Le NON quant à lui baisse légèrement à 53,26 %. Quant au troisième référendum, le NON l’emporte une nouvelle fois.

Face à la situation d’insurrection que traverse l’archipel français, Emmanuel Macron a convoqué un Conseil de défense et de sécurité nationale, affirmant la nécessité d’un renforcement des mesures et d’un appel au calme. Pour sa part, Gabriel Attal, a annulé une visite dans l’Essonne pour assister à la séance des questions au gouvernement. Lors de son intervention devant les députés, le Premier ministre a quant à lui plaidé pour un “retour au calme” et la conclusion d’un “accord politique global“. Cela implique notamment une discussion élargie sur le statut institutionnel de l’archipel, au-delà de la seule question électorale. Ainsi, le gouvernement propose aux forces politiques calédoniennes de se rendre à Paris pour entamer ce dialogue. Par ailleurs, Emmanuel Macron a indiqué qu’il ne convoquerait pas les parlementaires en Congrès avant la fin du mois de juin, une étape nécessaire pour l’adoption de sa réforme constitutionnelle.

L’état d’urgence déclaré

Bien que les Républicains (LR) et le Rassemblement national (RN) soutiennent la démarche du chef de l’État, les oppositions de gauche demandent un report du texte, arguant que son rejet signifierait l’exclusion de certaines personnes présentes en Nouvelle-Calédonie depuis vingt-cinq ans, y compris des jeunes Calédoniens nés sur le territoire, qui ne pourraient pas voter. Jean-Luc Mélenchon quant à lui parlé de « décolonisation » pacifique et s’oppose à cette réforme.

Marine Le Pen et François Xavier Bellamy ont appelé à mettre en place l’état d’urgence en Nouvelle-Calédonie. C’est désormais chose faite, l’Élysée a indiqué en début d’après-midi la mise en place de l’état d’urgence sur place.

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