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Keir Starmer à Washington : l’aube d’une fin de conflit pour l’Ukraine ?
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Le 27 février 2025, Keir Starmer, Premier ministre britannique, a franchi l’Atlantique pour s’entretenir avec Donald Trump à la Maison-Blanche. Au menu de cette visite très attendue : la guerre en Ukraine, les perspectives d’un accord commercial bilatéral et les défis de la sécurité transatlantique. Dans un monde marqué par des tensions géopolitiques croissantes, cette rencontre entre le leader travailliste et le président américain a cristallisé les espoirs et les incertitudes d’une coopération renouvelée entre Londres et Washington.
Contexte et enjeux de la visite
La visite de Keir Starmer intervient à un moment clé pour les relations transatlantiques entre le Royaume-Uni et les États-Unis. Le Premier ministre souhaite préserver la relation spéciale entre Londres et Washington. De son côté, Donald Trump, revenu au pouvoir en janvier 2025, souhaite une résolution rapide du conflit ukrainien. Une promesse qu’il a martelé au cours de sa campagne.
Cette rencontre s’inscrit dans une séquence diplomatique intense : quelques jours plus tôt, le président français Emmanuel Macron avait lui aussi rencontré Trump, sans obtenir de garanties fermes sur le soutien américain à l’Ukraine. De plus, le président ukrainien Volodymyr Zelensky doit se rendre prochainement à Washington pour finaliser un accord sur les minerais rares, un dossier stratégique pour Trump.
Dans ce contexte, Starmer avait pour objectif de convaincre son homologue américain de maintenir un rôle actif dans la sécurité européenne, tout en avançant sur d’autres priorités bilatérales, comme un éventuel accord commercial. Les discussions, tenues dans le Bureau ovale puis prolongées par un déjeuner de travail, ont été suivies d’une conférence de presse conjointe dans la East Room de la Maison-Blanche.
La guerre en Ukraine : une paix à quel prix ?
Le conflit russo-ukrainien, entré dans sa troisième année, a dominé les échanges entre Starmer et Trump. Le Premier ministre britannique est arrivé avec une position claire : tout accord de paix doit être « dur et équitable » et ne pas récompenser l’agresseur, à savoir la Russie. Starmer a insisté sur la nécessité d’une implication américaine pour garantir la sécurité à long terme de l’Ukraine, proposant que le Royaume-Uni soit prêt à déployer des troupes et des avions dans le cadre d’une force de maintien de la paix, mais uniquement avec un filet de sécurité américain en cas de nouvelle agression russe.
Trump, quant à lui, a réitéré sa confiance dans une solution rapide, affirmant qu’un accord de paix pourrait être conclu rapidement. Il a défendu l’idée que la présence d’intérêts économiques américains en Ukraine, notamment via un accord sur les minerais rares, suffirait à dissuader Vladimir Poutine de toute nouvelle incursion. Lors de la conférence de presse, Donald Trump a affirmé que le maitre du Kremlin « tiendrait parole » sur un éventuel accord, une position qui contraste avec le scepticisme européen face aux intentions du dirigeant russe. Trump a toutefois esquivé une promesse explicite de soutien militaire, suggérant que les Européens, et notamment les Britanniques, pourraient « se débrouiller seuls » avant d’ajouter que les États-Unis « aideraient toujours » le Royaume-Uni en cas de besoin.
Les relations économiques : vers un accord commercial ?
Au-delà de l’Ukraine, les discussions ont porté sur la revitalisation des relations économiques entre le Royaume-Uni et les États-Unis. Trump a évoqué la possibilité d’un « très bon accord commercial » entre les deux pays. Cette perspective est cruciale pour Starmer, qui doit gérer une économie britannique fragilisée par les conséquences du Brexit et menacée par d’éventuelles taxes américaines sur les importations européennes.
Trump a insisté sur l’idée d’un accord « équilibré », notant que les États-Unis bénéficiaient déjà d’un léger surplus commercial avec le Royaume-Uni. Les détails restent flous, mais la perspective d’un partenariat économique renforcé a été saluée par Downing Street comme une victoire potentielle pour Starmer, qui cherche à démontrer sa capacité à obtenir des résultats concrets sur la scène internationale.
La visite a aussi été marquée par des gestes symboliques. Starmer a remis à Trump une lettre de Charles III l’invitant à une visite d’État au Royaume-Uni, un honneur rare pour un président américain en exercice. Ce dernier s’est dit « très honoré » et a vanté sa relation avec le roi, qu’il a qualifié de « bel homme merveilleux ».
La liberté d’expression au Royaume-Uni : un sujet sous-jacent
Bien que non explicitement au programme des discussions, la question de la liberté d’expression au Royaume-Uni a plané en toile de fond de cette visite, notamment en raison des récentes politiques de Starmer et de leur perception à l’international. Depuis son arrivée au pouvoir, le gouvernement travailliste a renforcé les lois sur les discours de haine et la désinformation en ligne, avec une extension controversée de la législation, comme l’Online Safety Act. Ces mesures, visant à lutter contre les contenus extrémistes et les campagnes de désinformation attribuées à des acteurs étrangers comme la Russie, ont suscité des critiques au Royaume-Uni et à l’étranger du fait de leurs caractères liberticides.
Trump, connu pour son attachement à une vision libertarienne de la parole publique, n’a pas abordé ce sujet publiquement lors de la visite, mais des proches de son administration ont laissé entendre qu’il voyait d’un mauvais œil les restrictions britanniques, notamment J.D Vance, le vice-président américain. Cette tension pourrait compliquer les relations bilatérales à l’avenir, notamment si les États-Unis devaient conditionner un accord commercial à des ajustements dans les politiques britanniques sur la régulation d’Internet.
Réactions et perspectives
Les réactions à cette visite ont été mitigées. Les médias britanniques, comme le BBC et le Guardian, ont noté l’absence de garanties fermes sur l’Ukraine, soulignant que Starmer n’a pas obtenu le « filet de sécurité » militaire qu’il espérait.
Pour Starmer, cette visite marque un test de leadership. Après un début de mandat difficile au Royaume-Uni, il cherche à s’imposer comme un acteur central dans la diplomatie européenne, capable de dialoguer avec un Trump. Le sommet européen prévu le dimanche suivant, où il devait retrouver Zelensky et d’autres leaders, sera une nouvelle occasion de pousser son agenda. Quant à Trump, sa posture suggère qu’il entend continuer à privilégier les intérêts américains, laissant à l’Europe la responsabilité de définir son propre avenir sécuritaire. Cette dynamique promet des mois à venir riches en tensions et en négociations.
3 commentaires
SapereAude
Il es possible qu’avec son nouvel accord de libre échange, Trump essaie de diminuer le poid du trop grand rapprochement récent entre le 1er ministre et la commission européenne (dans le dos du peuple majoritairement pour le Brexit). Et avec son accord de paix avec l’Ukraine et ses frais de douane, Trump essaie d’isoler les pays européens qui restent dans l’union. Ceux-ci verraient alors l’Euro s’écrouler pour compenser les pertes sur les exportations, et finiraient par se replier sur eux-même économiquement, mais aussi idéologiquement, si bien que toute la structure bruxelloise imploserai. La question se posera alors : combien d’européens abandonneront tout espoir en la démocratie, et choisiront un système théologique de remplacement (dont la potentialité est déjà prominente par l’implantation existante), ou qui aura les épaules plus larges que Trump pour pouvoir renouer avec les fondamentaux de l’héritage démocratique et civilisationel dont a hérité l’Europe.
Signaler un abusIrrefragable
Je ne crois pas me tromper en affirmant que, Boris Johnson n'avait pas particulièrement oeuvré pour la paix au tout début de la guerre russo-ukrainienne. Il me semble même qu'alors que la voie diplomatique était encore possible, le Royaume-Uni a pesé de tout son poids pour empêcher tout discussion entre l'Ukraine et la Russie dans les premières semaines qui ont suivi l'offensive russe. Du reste, tout au long du conflit, contrairement à la France qui n'a jamais su sur quel pied danser, la position britannique a toujours été claire, et on peut dire que cette position était plus "anti-russe" qu'elle n'était "pro-Ukraine". Contrairement au président hongrois qui sans être fondamentalement "anti-russe" était pourtant pro-Ukraine". Ainsi, à l'heure où paraît-il, il s'agit de faire la paix, les exigences britanniques sont pour moi exactement comme leur politique migratoire: complètement folles.
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