Politique
Grande Mosquée de Paris et ingérence algérienne : « Des enquêtes sont-elles en cours ? » demande Matthias Renault
Depuis sa création, en 1926, tous les recteurs de la Grande Mosquée, située dans le 5ᵉ arrondissement parisien, sont nés en Algérie. En pleine crise entre Paris et Alger, l’attention se tourne plus que jamais vers cet édifice religieux emblématique.
Un financement algérien sous les projecteurs
«La Grande Mosquée de Paris est d’abord algérienne et ne sera jamais autre chose», déclarait son recteur en décembre 2020. Pour le député, en pleine crise diplomatique avec l’Algérie, cette phrase mérite un examen attentif.
Depuis 2020, Chems-Eddine Hafiz est à la tête de la Grande Mosquée de Paris, une nomination validée à l’époque par le ministère de l’Intérieur, dirigé par Gérald Darmanin. Mais la situation a vraiment commencé à faire parler en 2022, quand le gouvernement algérien a accordé un financement de 2 millions d’euros à la mosquée, un geste qui continue de susciter bien des questions.
À commencer par celles de Matthias Renault, qui rappelle également que le lieu de culte musulman a été désigné comme mandataire exclusif pour la certification halal par les autorités algériennes, comme le révèle un article du journal Le Point. Un rôle qui, selon le député RN, pourrait offrir au recteur et à son entourage l’opportunité de toucher des commissions sur ces certifications. Autant dire que ces soupçons viennent assombrir encore un peu plus les relations déjà bien entamées entre Paris et Alger.
Des relations étroites avec les Frères musulmans
Les liens entre Chems-Eddine Hafiz et les Frères musulmans ne passent pas inaperçus dans la lettre de Matthias Renault. En février 2023, le recteur de la Grande Mosquée de Paris participe au 12ᵉ colloque annuel de cette organisation en France. Lors de cet événement, il se présente comme l’organisateur de «la communauté nationale», une expression que beaucoup interprètent comme une référence directe à la diaspora algérienne en France.
Mais ce n’est pas tout. Le député RN évoque également le rôle joué par la mosquée dans la campagne présidentielle algérienne de 2024, organisée sur le sol français. Une implication qui, selon lui, montre à quel point les liens entre M. Hafiz et les autorités algériennes peuvent aller loin. «Toute opacité fait peser une forte suspicion», insiste-t-il.
Le silence sur des sujets sensibles
Au-delà des financements, Chems-Eddine Hafiz se retrouve aussi critiqué pour ses prises de position sur des sujets sensibles. Matthias Renault pointe notamment son refus de qualifier le Hamas de mouvement terroriste, même après les événements tragiques du 7 octobre. Parallèlement, le recteur aurait multiplié les accusations d’islamophobie contre la société française, en reprenant des discours proches de ceux des Frères musulmans.
Le député ne cache pas son étonnement face au silence de M. Hafiz concernant l’arrestation arbitraire de l’écrivain Boualem Sansal par le régime algérien. Une attitude qu’il juge incohérente, d’autant que le recteur avait auparavant appelé «les musulmans de France à faire entendre leur voix» après le décès de Nahel Merzouk. Plus récemment, la Grande Mosquée de Paris s’est attirée de nouvelles critiques en publiant un communiqué visant l’ancien ambassadeur Xavier Driencourt et en attaquant le lanceur d’alerte Chawki Benzehra, menacé de mort pour avoir dénoncé les appels à la haine contre la France par des influenceurs algériens.
Une demande de transparence
Pour Matthias Renault, ces faits soulèvent une question centrale : les financements et les activités de la Grande Mosquée de Paris respectent-ils réellement les lois françaises, notamment la loi de 2021 sur les principes républicains ? «Toute opacité fait peser une forte suspicion d’ingérence», avertit-il. Le député demande donc au ministre de l’Intérieur si des enquêtes sont en cours pour clarifier la situation. «Les réponses à ces questions sont essentielles pour garantir que la France reste ferme face à toute tentative d’influence étrangère sur ses institutions religieuses», insiste-t-il.
À ses yeux, l’urgence est réelle. Matthias Renault appelle à une vigilance renforcée contre des stratégies d’«entrismes» visant à «ramper insidieusement au sein de nos sociétés avec des idées contraires à nos valeurs laïques et républicaines».
Déjà sous le feu des critiques, la Grande Mosquée de Paris tente pourtant de montrer patte blanche depuis quelques temps. Dans un communiqué publié le 6 janvier, elle se déclare victime du « poison de l’extrême-droite » et cherche à envoyer un signal d’apaisement. Pour marquer son attachement à la République, elle a demandé à ses imams de conclure chaque prêche par une invocation explicite : « Oh Allah, préserve la France, son peuple et les institutions de la République. ». Reste à savoir si ces prières suffiront à faire oublier les zones d’ombre pointées par Matthias Renault.
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