Politique
[Édito] : Gabriel Attal, l’anti-Bardella
La nomination de Gabriel Attal est autant un désaveu cinglant des ambitions présidentielles de Darmanin, Le Maire et Philippe, qu’une valorisation indirecte de Jordan Bardella, le président du RN.
En choisissant de nommer comme Premier ministre une personnalité plus populaire que lui, le président Macron qui ne pourra pas se représenter en 2027, donne sa chance à Gabriel Attal pour en faire son successeur, en cas de succès. Il choisit ainsi de puiser parmi les fidèles le plus fidèle de tous. Et de sauter une génération, allant encore plus loin dans ce qu’il appelle la “disruption”.
Mais en plus de cette mise sur les rails d’un successeur, qui plus est nommé sans l’aval du quatuor infernal Ferrand-Bayrou-Philippe-Kohler, cette nomination entérine un autre duel : celui avec Jordan Bardella.
Non pas qu’Emmanuel Macron parie sur une désignation du jeune président du RN comme candidat à la présidentielle de 2027 à la place de Marine Le Pen — ce qui est peu probable — mais qu’il a bien identifié que cette nouvelle star de l’opposition s’inscrivait dans l’avenir et qu’il ne fallait donc pas lui opposer un dinosaure politique, vieux et notable, mais un jeune loup, aussi habile que lui sur les réseaux sociaux et auprès des jeunes générations.
Gabriel Attal : le sauveur des européennes pour la majorité ?
La première étape sera les élections européennes : certes, Gabriel Attal n’est pas la tête de liste de Renaissance, mais en tant que chef du gouvernement, il portera cette campagne et aura ainsi à affronter en débat le jeune Bardella. Cela est arrivé plusieurs fois déjà, et d’abord en 2019, dans le magazine Valeurs Actuelles.
Gabriel Attal, premier ministre à seulement 34 ans ? Par contraste, cela crédibilise encore plus Jordan Bardella dont la jeunesse ne sera plus un défaut pour certains. Les deux se connaissent, sont populaires (Bardella numéro 1 et Attal numéro 2 auprès des Français), loyaux vis-à-vis de leur mentor et ont pour force commune de savoir parler aux Français.
Il restera un défi pour les deux : que pensent-ils vraiment au fond d’eux ? Au-delà d’être les fidèles de leurs chefs ? On a vu Attal s’imposer sur l’abaya et porter un véritable discours personnel sur le harcèlement scolaire, à travers notamment un interview à Audrey Crespo Mara décapant. On a vu Jordan Bardella assumer une fibre populaire alliée à une ligne plus identitaire. Il leur restera tous deux de tenir sur la durée. De ne pas être perçus comme déloyaux tout en existant en personnalités propres.
À Attal l’enjeu d’éviter l’enfer de Matignon, à Bardella de ne pas être tenté de l’affronter
Quoi qu’il en soit, Bardella sort renforcé de cette séquence : les commentateurs ne se priveront pas, dans les heures à venir, d’affirmer qu’Attal est l’arme anti-Bardella. À 28 ans, participer indirectement à la nomination du plus jeune premier ministre de la Vᵉ République, car on fait peur dans les sondages, c’est un exploit. Le match est ouvert et le score des européennes tranchera.
À lire aussi : Bardella, seul politique dans le classement du JDD
2 commentaires
Gabriel Attal : "l'arme anti-Bardella" s'enraye
[…] À lire aussi : [Édito] : Gabriel Attal, l’anti-Bardella […]
Signaler un abusDoïc Rouvrais
La seule question qui vaille à cet instant précis, ce n’est certainement pas l’âge du tout nouveau Premier ministre – dont finalement nous nous moquons tous éperdument tellement qu’il s’agit d’un détail – mais bien de savoir ce que M. Attal pourrait apporter dans les plus brefs délais à une France blessée et sur-convalescente, enfin de manière concrète et efficace. Et c’est là que le bât blesse : le nouveau Premier ministre est un idéologue marqué au fer blanc du socialisme moralisateur qui va désormais devoir se renier pour résoudre un à un tous les problèmes qui n’auraient jamais prospéré sans son idéologie mortifère…
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