Union européenne : c’est l’Histoire qu’on assassine !
André Rougé est eurodéputé RN et spécialiste de la question des Outre-mers. Dans cette tribune, il dénonce la résolution Verheyen, grand bond en avant dans le fédéralisme européen.
Après le « pacte asile et migration » organisant la submersion migratoire, le « rapport Verhostadt » souhaitant faire de la Commission européenne un exécutif fédéral central et avoir voté, fin 2023, une résolution appelant à dessaisir les élus nationaux de leur pouvoir de faire la loi, le Parlement européen a recommandé, le 17 janvier, d’abolir l’enseignement des histoires nationales et de les remplacer par un corpus unique, labellisé par Bruxelles. Macronistes et socialistes ont soutenu le projet et les LR, fidèles à eux-mêmes… se sont abstenus !
Notre délégation d’élus du Rassemblement National, emmenée par Jordan Bardella, a bien évidemment voté contre.
Quand la « droite » devient woke
Les excités qui, en 2020, ont vandalisé, à Londres, la statue de Winston Churchill ou à Metz, en 2022, celle de Charles de Gaulle, sont décidément « petits bras » comparés à mes 409 collègues députés au Parlement européen (sur 705) qui, l’autre semaine, ont voté la résolution de l’élue allemande Sabine Verheyen, favorable à l’émergence d’une « conscience européenne éclairée »… « Éclairée » par qui ? Sans doute par ce phare de l’intérêt général qu’est Ursula von der Leyen, dont Mme Verheyen est l’une des plus fidèles courroies de transmission au sein de l’hémicycle.
Issue comme elle de la CDU, donc théoriquement de « droite », cette dernière a fait adopter, en sa qualité de présidente de la commission de la Culture et de l’Éducation, un texte qu’auraient pu rédiger les tenants les plus exaltés de l’idéologie woke — elle-même en perte de vitesse sur les campus américains où elle a pris son essor — et dans lequel se concentrent tous les ingrédients d’une débâcle de la pensée.
Si, comme l’espèrent ses promoteurs, cette résolution venait à inspirer aux commissaires de Bruxelles une directive reprenant ses attendus, c’est tout ce qui reste de l’enseignement de l’histoire, déjà bien abîmé par un demi-siècle d’abandon des repères chronologiques les plus élémentaires et par le primat de la « transversalité », qui achèverait de s’écrouler…
Que demande en effet la résolution Verheyen ? Rien de moins que d’élaborer une histoire officielle se substituant aux programmes d’enseignement en vigueur dans chaque État membre afin de développer, à partir d’un « récit européen » unique, une « conscience supranationale » permettant d’effacer définitivement les histoires nationales qualifiées de « vaches sacrées » (sic) !
Passons sur le coup d’État juridique que constituerait l’adoption d’un tel principe puisque, au terme des Traités, l’éducation reste du ressort exclusif des gouvernements nationaux. Passons même sur la stupidité foncière consistant à faire émerger une « conscience historique européenne » en extirpant de la mémoire des peuples ce qui forge leurs identités singulières et, partant, la richesse et la diversité de la culture européenne. « Dante, Goethe, Chateaubriand, appartiennent à toute l’Europe dans la mesure même où ils étaient respectivement et éminemment Italiens, Allemands et Français », résumait déjà De Gaulle dans sa célèbre conférence de presse de 1962 où il récusait le projet supranational de Jean Monnet. « Ils n’auraient pas beaucoup servi l’Europe s’ils avaient été des apatrides et qu’ils avaient pensé, écrit en quelque espéranto ou volapük intégrés… », précisait-il ensuite.
La résolution Verheyen : une étape dans le projet fédéraliste de l’UE
Le plus grave, dans ce projet, c’est le dénominateur commun de l’histoire européenne que ses promoteurs entendent dégager pour justifier leur frénésie constructiviste digne du « socialisme scientifique » soviétique, lequel prétendait faire émerger un « homme nouveau » des décombres du passé. Un passé, comme le proclame le premier couplet de L’Internationale, dont il importe de faire « table rase » en l’assimilant à l’enfer pour mieux justifier l’édification du paradis à venir.
Croit-on que j’exagère ? Lisez plutôt le principal « considérant » de la résolution Verheyen : « Le chauvinisme, les stéréotypes sexistes, les asymétries de pouvoir et les inégalités structurelles sont profondément ancrés dans l’histoire européenne ». D’où l’appel à « encourager les styles d’enseignement […] qui privilégient la réflexion et la discussion plutôt que le transfert de connaissances ». Vous avez bien lu : à la transmission, préférer la discussion. Mais de quoi discuter sans « connaissances », si ce n’est exclusivement des thèmes imposés par les nouveaux censeurs de l’histoire européenne ? Chez Mao et chez les Khmers rouges, on appelait cela de la « rééducation ». On s’est longtemps gaussé, à juste titre, du « récit national » bâti par la Troisième République, privilégiant à l’excès les gloires de France et minimisant à dessein défaites et échecs. Mais alors que dire d’un « récit supranational » dont la principale fonction, comme l’indique l’exposé des motifs de la résolution, serait de « réévaluer toutes les sombres périodes de l’histoire européenne » en particulier « les violations des droits de l’homme et les injustices historiques fondées sur le genre » ?
Une Nation, disait Renan est « une âme, un principe spirituel ». Nul doute qu’au terme d’une « formation » aussi honteusement sélective, toute conscience morale aura disparu, et la formule qui viendrait naturellement à l’esprit des jeunes serait : « Nos ancêtres les salauds ! ».
Il est temps d’en finir avec ce masochisme, sauf à vouloir faire de l’Europe la première civilisation fondée sur la haine de soi… et donc de la conduire à l’autodestruction !
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