Politique
Agriculteurs : les manifestations reprennent contre l’accord de libre-échange du Mercosur
Les campagnes françaises renouent avec la contestation, moins d’un an après d’intenses mobilisations. En ligne de mire des agriculteurs : l’accord UE-Mercosur, jugé dévastateur pour l’agriculture nationale à l’approche des élections professionnelles de janvier.
Moins d’un an après une série de mobilisations sans précédent, les agriculteurs retrouvent la voix de la contestation. Les syndicats agricoles, bien qu’en ordre dispersé, rallument la flamme de la colère à l’approche des élections professionnelles de janvier. En ligne de mire : l’accord de libre-échange UE-Mercosur, accusé de menacer l’agriculture française.
Dès l’aube, ce lundi 18 novembre, 85 points de manifestations se sont levés à travers la France, selon Pierrick Horel, président des Jeunes Agriculteurs. Barrages filtrants, rassemblements devant des préfectures, les méthodes se veulent moins spectaculaires qu’en 2023, mais la tension demeure palpable.
Les agriculteurs ont passé la nuit sur la N118 près de Vélizy-Villacoublay.
Ils se sont engagés à lever le camp entre 10h et midi.
Des tracteurs bloquent les voies, côté gauche, mais une voie de délestage reste ouverte pour permettre aux automobilistes de circuler.@BFMTV pic.twitter.com/mlPAb04ytq— Noémie Wira (@NoemieWira) November 18, 2024
En Île-de-France, la N118 a été partiellement bloquée pendant la nuit par une centaine de tracteurs. Ce matin, le blocage était levé, mais la circulation reste perturbée sur plusieurs axes. « On ne croit pas au grand soir, mais il y a une immense colère sur le terrain », confie Clément Torpier, responsable des Jeunes Agriculteurs d’Île-de-France, qui préfère des actions mesurées à des blocages prolongés.
Un accord controversé : entre promesses européennes et menaces sur les agriculteurs
Le traité Mercosur, en négociation depuis 2019, cristallise les inquiétudes. L’accord prévoit d’ouvrir les marchés européens à des produits latino-américains, souvent jugés non conformes aux normes sanitaires et environnementales européennes. « On ne doit pas signer cet accord, le message est clair », a déclaré Clément Torpier sur Sud Radio.
Bruxelles promet que les volumes importés seront limités, mais les syndicats agricoles dénoncent une concurrence déloyale et la déstabilisation des filières françaises. « L’agriculture européenne ne peut pas rivaliser avec des normes aussi laxistes », s’insurge Enrico Somaglia, secrétaire général adjoint de l’EFFAT, une fédération européenne des syndicats agricoles.
Macron en première ligne, Barnier sous pression
Depuis l’Amérique du Sud, Emmanuel Macron a réaffirmé la position française sur cette question. « La France ne signera pas ce traité en l’état », a-t-il martelé dimanche depuis Buenos Aires, après un échange avec le président argentin Javier Milei. À Paris, Michel Barnier, Premier ministre, tente d’apaiser les tensions. Mais les promesses faites en début d’année par son prédécesseur, Gabriel Attal, semblent toujours en suspens. Simplifications administratives, revenus agricoles décents, lutte contre la concurrence déloyale : autant de mesures qui peinent à se concrétiser.
Face aux tensions, Michel-Édouard Leclerc, président des magasins Leclerc, tend la main aux agriculteurs. « Une alliance permettrait de mieux négocier, l’union fait la force », a-t-il déclaré ce matin sur BFMTV. Il appelle à renforcer la transparence avec le label Origin’info, afin de rassurer les consommateurs. Sur le terrain, les agriculteurs espèrent un soutien populaire, essentiel pour maintenir la pression sur l’exécutif. « La population nous soutient, elle klaxonne et applaudit », témoigne Clément Torpier.
Non, l’inflation n’est pas derrière nous, et ça pourrait reprendre… Au Parlement, on parle beaucoup de taxes dans le budget : sur le sucre, sur certains produits… Stop aux taxes ! https://t.co/7KwBPLf2Do
— Michel-Edouard Leclerc (@Leclerc_MEL) November 18, 2024
Une colère européenne en écho à la France
Si la France demeure l’hôte des manifestations agricoles les plus véhémentes, les échos de la colère du monde paysan résonnent sur tout le Vieux Continent. En Allemagne, en Italie ou encore en Pologne, les syndicats dénoncent un accord « incohérent » et appellent à des renégociations. Toutefois, les gouvernements restent divisés.
La bataille contre le Mercosur, emblématique des tensions entre globalisation et souveraineté alimentaire, s’annonce longue. En France, les tracteurs reprennent la route. Mais les « feux de la colère » seront-ils suffisants pour faire plier Bruxelles ?
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